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Page:Faure - Encyclopédie anarchiste, tome 3.djvu/607

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PAP
1950

guerre religieuse et servit de prétexte à la persécution et à l’expulsion de centaines de milliers de réformés.)

Chaque fois qu’ils y eurent intérêt, les Papes n’hésitèrent pas à provoquer des guerres et des révolutions. Grégoire VII, par ses prétentions théocratiques, mit l’Allemagne à feu et à sang (ce qui n’a pas empêché l’Église de le canoniser !). Sixte-Quint loua le zèle et le courage du dominicain Jacques Clément, qui avait assassiné le roi Henri II, auquel on reprochait de ne pas servir assez docilement la cause anti-luthérienne. Les Papes ont donné aux monstrueux rois d’Espagne les directives sanglantes que l’on connaît. Cette malheureuse nation en est restée épuisée et dégénérée pour des siècles. Les guerres de Vendée sont également l’œuvre de la Papauté, ainsi que les récentes insurrections du Mexique, sans parler du rôle machiavélique joué par elle lors du déclenchement de la guerre de 1914 — dont elle attendait un regain d’influence et le rétablissement de son pouvoir temporel, réalisé en février 1929, grâce à la complicité du trop célèbre Mussolini.

Voilà l’institution dont on nous demande d’admirer la sainteté, le caractère surnaturel et la haute vertu moralisatrice ! Et nos gouvernants, même « laïques », acceptent de congratuler ces gens-là, sachant pertinemment qu’en abrutissant le peuple, l’Église travaille à conserver leurs privilèges !

Pour édifier le lecteur sur l’œuvre moralisatrice ( ?) du Vatican, il me suffira de reproduire quelques documents puisés au hasard, à travers les siècles :

ive siècle. — « Le frère se sépare de sa sœur qui fait profession de virginité ; la sœur dédaigne son frère qui vit dans le célibat et cherche ailleurs un autre frère ; tous deux paraissent prendre le même parti ; puis, sous prétexte de se procurer des consolations spirituelles, ils ont chez eux, avec des étrangers, un commerce charnel. » (De Custodia, p. 327.)

« Puis-je raconter sans douleur combien de vierges succombent tous les jours ; combien l’Église en voit périr dans son sein : combien, semblables à des étoiles scintillantes, deviennent les esclaves du démon ; combien de cœurs enfin, aussi durs que la pierre, s’ouvrent cependant à ce serpent qui s’y glisse comme dans une retraite ? Quelles sont celles-là qui, la tête haute, marchent à pas comptés, cachant sous une toilette simple et modeste une vie déréglée que l’on ne connaît que par leur grossesse et par les cris des enfants ? Ce sont des vierges devenues veuves avant leur mariage. Il y en a qui procurent la stérilité à leur sein, et ainsi commettent l’homicide d’un homme qui n’est pas encore né. D’autres se sentant criminellement enceintes ont recours aux poisons qui font avorter. Et comme souvent elles périssent avec leur embryon, elles descendent aux enfers chargées de trois crimes, homicides d’elles-mêmes, adultères de Jésus-Christ, parricides de leur enfant, même avant sa naissance. » (Saint Jérôme, De Custodia, p. 326.)

(Cf. saint Jean Chrysostôme, Homélies quod regulares feminoe… et Contra eos qui subintroductas habent.)

ve siècle. — « Nous appelons les femmes qui demeurent avec nous nos mères, nos sœurs et nos filles, n’ayant point de honte d’employer ces noms de piété à couvrir nos débauches. Que fait le moine dans la chambre des femmes ? Que signifient ces tête-à-tête intimes et ces yeux qui fuient les témoins ? » (Saint Jérôme, édition Martianney, t. IV, p. 287.)

vie siècle. — « L’incontinence, à en juger par le grand nombre de canons qui la condamnent, paraît avoir été la grande plaie du clergé espagnol. » (Abbé Guyot, Somme des Conciles, t. I, p. 385).

viie siècle. — Le concile Quinisecte ou in Trullo, en

692, nous apprend (canon 86) qu’il était devenu urgent de réprimer un scandale courant : le proxénétisme des clercs ! Les clercs tenaient des lupanars.

viiie siècle. — Les mœurs du clergé vont en se corrompant chaque jour davantage, de l’aveu des conciles successifs de 742, 744, 787, 753, 757. Les prêtres portent les armes, se livrent aux orgies, à l’usure, à la simonie ; l’orgueil, l’avarice, la luxure et l’ambition sont leurs vices les plus communs.

ixe siècle. — « Les clercs n’auront absolument aucune femme chez eux, pas même leur sœur ; car il y a des prêtres qui, faisant de leurs propres sœurs leurs concubines, leur ont engendré des enfants. » (Concile de Mayence en 847 et Concile de Metz en 888.)

xe siècle. — Pendant plus de cinquante ans, l’Église fut gouvernée par trois prostituées lesquelles firent trois papes.

Une patricienne de Rome, Théodora, avait deux filles, Théodora la jeune et Marouzie. Celle-ci, maîtresse du pape Sergius III eut de lui un fils, Jean (Jean XII). A la mort de ce pape, Théodora, la mère, lui donna pour successeur son amant, Jean X. Aidée de son mari, Guy, fils aîné de son amant, le marquis de Toscane, Marouzie renverse Jean X, l’amant de sa mère et le fait étouffer en prison et place sur le trône pontifical, successivement Léon VI, Étienne VII et Jean XI, un fils qu’elle avait eu de Sergius III, et qui fut Jean XII. Un mari ayant surpris ce pape dans les bras de sa femme, l’assomma d’un coup de marteau sur la tempe. (Annales ecclésiastiques, de Baronius, t. XV, etc. ; Fleury, Hist. Ecclés., liv. XIV.)

« Nous ne disons rien qui ne soit vu et avoué de tout le monde. Nous en pouvons prendre à témoin la veuve de Rénier, son vassal, dont il est si amoureux qu’il lui a confié le gouvernement de plusieurs villes, et qu’il lui a donné des croix et des calices d’or de l’église de Saint-Pierre du Vatican. Nous en prendrons encore à témoin Étiennette, une de ses maîtresses, qui mourut ces jours passés, en accouchant avant terme, d’un enfant qu’elle avait eu de lui. Mais quand ces personnes-là demeureraient dans le silence, les pierres crieraient, et le palais de Latran, qui était autrefois une retraite de personnes de vertu, et qui est devenu maintenant un lieu de débauche et de prostitution, élèverait sa voix pour lui reprocher ses amours, et pour condamner le commerce infâme qu’il entretient avec la sœur d’Étiennette ; Étiennette, concubine d’Albéric, son père. Nous prendrons encore à témoin l’absence des femmes de toutes les nations qui n’oseraient venir faire leurs prières au tombeau des Apôtres de peur d’y recevoir un traitement pareil à celui qu’ont reçu des femmes mariées, des veuves et des filles, qui ont été les victimes de son impudicité… » (Rapport fait à l’empereur Othon par les évêques assemblés en concile, année 962, sur la conduite du pape Jean XII. Mémoires de Luitprand, évêque de Crémone, traduits par le président Cousin, t. II de l’Hist. de l’empire d’Occident, 1683.)

« Ces débauches étaient payées avec le trésor de l’Église que la simonie alimentait et que l’on n’avait garde d’employer aux usages légitimes. On parle d’un évêque consacré à l’âge de 10 ans, d’un diacre ordonné dans une écurie, de dignitaires aveuglés ou transformés en eunuques. La cruauté complétait l’orgie. Pour que rien ne manquât, on raconte que dans les festins de Latran, il arrivait au pape de boire à la santé du diable. » (Abbé Duchesne, chargé de cours à la Faculté catholique de Paris, Les commencements de l’État pontifical, Albert Fontemoing, éditeur, Paris 1898.)

xie siècle. — Trois papes siègent concurremment à Rome : Sylvestre II à Saint-Pierre, Jean XX à Sainte Marie Majeure, et Benoît IV au palais de Latran.