Page:Faure - Encyclopédie anarchiste, tome 4.1.djvu/275

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
PUB
2241

rait signifier que le cerveau n’est pas l’organe le plus élaboré, celui qui marque le mieux le niveau de notre évolution. » (Léon Brunschvicg.) Cela est incontestable lorsqu’il s’agit de motiver la place occupée par l’homme dans la série animale. Dans l’être humain, la fonction du cerveau est une fonction de coordination intégrée dans l’ensemble des autres. À mesure que le flux nerveux ou psychique s’élève d’un échelon, intéresse des régions supérieures, il s’associe à d’autres courants, se coordonne avec eux, d’obscur devient clair, s’achève en pensée réfléchie accompagnée de jugement. On peut alors le qualifier de pensée consciente, sans prétendre que sa nature ait changé.

Y a-t-il dans une société quelque chose d’analogue qui mérite d’être qualifié de conscience collective ou sociale ? On peut assurément relever certaines analogies. Il y a dans le corps social des courants d’idées qui restent confinés dans un domaine restreint, associations civiques ou économiques à buts limités ou temporaires. D’autres englobent des intérêts plus généraux, mais localisés, sans grand retentissement extérieur. D’autres animent les grands appareils fonctionnels de l’État, inspirent leurs statuts et règlements professionnels, entretiennent leurs coutumes, vivifient leur esprit de corps. Enfin, des institutions communes consacrent la cohésion d’une nation.

Mais, de cet ensemble, plus ou moins judicieusement systématisé, voyons-nous surgir quelque chose de comparable à une entité de caractère transcendant, à laquelle nous devrions rendre hommage en la reconnaissant comme conscience sociale à caractère impératif, conscience nationale, dans l’état présent du monde ?

La personnification de la société comme qualitativement différente des personnes composantes est une pure hypothèse métaphysique. La réalité de la conscience sociale exigerait « que la France fût une personne, que l’Autriche fût une personne, que l’Humanité pût devenir un jour une personne, que la conscience collective eût une existence et une sorte de moi distinct de nos consciences propres. » (Alfred Fouillée). Durkheim l’admettait parce que, disait-il, la société est « la source et le lieu de tous les biens intellectuels qui constituent la civilisation ». Il n’y a là qu’une part de vérité. « La source et le lieu ne constituent pas une conscience. La vraie source, d’ailleurs, le vrai lieu de la civilisation est dans les consciences individuelles qui, réunies en société, réagissent les unes sur les autres. C’est sans doute la société qui nous affranchit de la nature ; mais en résulte-t-il que nous devions nous la représenter comme un être psychique supérieur à celui que nous sommes et d’où ce dernier émane ? Cette théorie métaphysique de l’émanation sociale ne nous paraît guère plus soutenable que celle de l’émanation divine. » (A. Fouillée.)

Mais, une fois écartée cette notion de conscience collective et désavouées les redoutables entités dans lesquelles on prétend l’incarner, il reste l’interaction des pensées individuelles et des idées qui règnent dans le milieu social. « Il n’est rien dans l’individu qui ne soit marqué de l’empreinte sociale, il n’est rien en lui qui ne réagisse sur la société, qui ne tende à la transformer plus ou moins et, par là, à transformer tous les autres esprits, et à le transformer, indirectement, lui-même. » (Fr. Paulhan.)

Quelle influence l’esprit individuel exerce-t-il sur les courants d’idées qui règnent dans le milieu social ? Quels germes de progrès y introduit-il ? Comment les innovations dues à son initiative se font-elles admettre et arrivent-elles à influer sur le comportement et l’orientation du groupe ? Cela constitue un chapitre de la sociologie.

De quels éléments empruntés au milieu social se forme et s’alimente la pensée personnelle ? Quel cadre

ce milieu impose-t-il à l’activité intellectuelle ? Quelle aide lui apporte-t-il ? Quel frein lui impose-t-il ? C’est là une partie essentielle de la psychologie que l’on tend aujourd’hui à étudier et à systématiser sous le nom de psychologie collective.

L’objet de cette science est extrêmement complexe, « l’étude en est à peine abordée » (Ch. Blondel). Non pas que cet objet ait été méconnu, mais on a apporté trop de passion dans l’interprétation des faits sur lesquels on pouvait s’appuyer pour la recherche. Sociocrates et individualistes égoïstes les dénaturaient au bénéfice de leur doctrine.

Dès la naissance, le milieu intervient dans la formation intellectuelle de l’enfant. « Alors que la plupart des animaux peuvent être abandonnés à eux-mêmes peu de temps après leur naissance, l’enfant a besoin, pendant de longues années, d’une protection attentive. Lorsqu’il est devenu un tant soit peu viable, il est déjà socialisé. » (G. Bouthone.) Auguste Comte admettait que, par sa nature même, la pensée de l’enfant évoluait conformément à la première phase de sa loi des trois états, qu’elle commençait par avoir un caractère animiste, religieux et même fétichiste. C’était attribuer à une innéité, dans le secret de laquelle nul ne peut pénétrer, pas même le sujet qui ne conserve aucun souvenir de sa toute première enfance, ce qui provient de l’ambiance. « Il ne faudrait pas confondre avec une interprétation spontanée les personnifications d’objets inanimés dont parents et nourrices croient devoir se servir pour entrer en communication d’idées avec l’enfant et pour se mettre à sa portée. Pour étudier avec fruit le développement de l’âme enfantine, il importerait d’éliminer rigoureusement les influences étrangères ; ce qui n’est pas possible. » (Weber.) Plus tard, c’est le langage qui impose son cadre à la pensée, et le langage est apport social. Il n’est sans doute pas de pensée qui ne soit accompagnée de parole intérieure. L’être lui-même ne prend pleinement conscience de son existence que par ses relations avec la société. La durée, hors de celle-ci, ne serait pour lui qu’une sensation imprécise. La mémoire ne permet de classer les incidents personnels qu’avec l’aide des repères empruntés aux groupements auxquels on est incorporé : famille, milieux professionnel ou politique, dont les éphémérides ou la tradition précisent la date.

Les tendances physiologiques et psychiques, les sentiments affectifs font partie de notre innéité, mais la société leur impose leur forme et leur fournit les moyens d’expression qu’elle maintient dans des limites étroites et dont elle réfrène les écarts. Cette inhibition, à son tour, est source de progrès individuel.

Toute la formation technique et scientifique de l’homme est l’œuvre de la société ; l’homme n’apporte que ses tendances et ses aptitudes ; la matière et les instruments, grâce auxquels ces dons innés seront mis en valeur, sont un apport social.

Le champ d’action de la psychologie collective est donc fort étendu. De l’étude de cette partie de la science dépend la solution de nombreux problèmes sociaux, au nombre desquels il faut compter ceux qui sont relatifs à l’éducation. — G. Goujon.


PUBERTÉ n. f. (du latin : pubis, poil). L’époque de la puberté est celle où les organes sexuels des jeunes gens arrivent à un état de développement notable, où des spermatozoïdes se forment dans les testicules du garçon, où les menstrues surviennent chez la fille, provoquées périodiquement par l’expulsion d’un ovule mûr. Des poils naissent, chez le mâle, à la racine de la verge, plus tard au creux des aisselles, sur les joues et le menton. Testicules et verge augmentent de volume, alors que le scrotum prend une couleur brunâtre, se couvre de poils et se plisse. Les organes génitaux se gonflent et se durcissent sous l’effet d’impressions volup-