vous érigeant en juges dans votre procès, qualifiés de crimes. Si c’était votre droit de les qualifier ainsi, n’était-ce pas le nôtre de faire voir que le crime ne venait pas de nous ? Que la première atteinte aux droits imprescriptibles des individus ne venait pas de notre côté, mais du vôtre ? »
Du point de vue psychologique, on admet que l’esprit de révolte existe à l’état latent dans tout encéphale humain. Si ce n’était, l’individu ne pourrait subsister dans les divers milieux où il se voit obligé de frayer durant son existence, et cet état psychologique lui permet en quelque sorte de s’adapter aux différentes modifications des milieux. Mais du fait que la tendance à la révolte existe, il ne s’ensuit pas fatalement que tous les individus soient des révoltés ; chez les uns, ce germe a tendance à se développer ; chez les autres, il semble plutôt s’atténuer ; et chez certains, il va jusqu’à s’atrophier ou s’hypertrophier. En effet, sous l’influence de l’ambiance dans laquelle se développe l’individu, celui-ci acquiert, plus ou moins, un potentiel d’esprit de révolte, mais il semble que tout milieu social détermine plutôt l’individu à atténuer la propension à la révolte. Cette réaction contre le sentiment de révolte est due au fait que, dès son jeune âge, l’enfant subit une éducation malsaine et faussée, tant dans la famille qu’à l’école ; ici comme là, on lui prêche l’obéissance, on lui inculque le respect des choses existantes ; il accepte la religiosité de la société présente, et, nanti de ce bagage de servilité, il grandit et se fraye un chemin dans la vie ; rien d’étonnant, alors, de constater le grand nombre de résignés, et ce ne sont que les rudes épreuves de la vie qui pourront faire espérer qu’ils deviendront un jour des candidats à la révolte. En eux, rien n’a été éveillé. L’esprit d’examen comme celui de critique ont entièrement été annihilés. Rares sont ceux qui eurent le bonheur de recevoir un autre enseignement : plus rationnel et plus libertaire. Sans doute, de temps à autre, certains esprits réagissent et ces phénomènes d’obéissance passive et craintive à l’égard des institutions – famille, patrie, propriété – s’exercent d’une manière tout opposée ; c’est là un phénomène de psychologie assez curieux qui concourt à la naissance de l’esprit de révolte. Aug. Hamon, dans sa « Psychologie de l’anarchiste socialiste » a tenté, en se basant sur une enquête faite auprès d’esprits révoltés, d’expliquer ces phénomènes qui revêtent des formes diverses d’inspiration : « En examinant, en critiquant, l’individu se refuse à admettre les opinions toutes faites, les phénomènes tels qu’on les présente. Il se révolte contre les idées généralement admises, contre les dogmes religieux, moraux, scientifiques. En contredisant des théories données, en faisant opposition à des actes, l’individu se révèle un révolté. Morphologiquement, examen, critique, contradiction, opposition sont identiques. » et, poursuit-il, « …des hommes qui veulent faire table rase des actuelles organisations sociales sont fatalement doués d’une cérébralité dont une des caractéristiques doit être la tendance à la révolte contre ce qui est. » Quiconque s’est donné la peine d’étudier la doctrine anarchiste constatera qu’elle enseigne la révolte et incite à la manifester ; il est logique que ceux qui s’en réclament approuvent cet enseignement et soient des révoltés.
Voici quelques citations empruntées à des ouvrages de théoriciens ou de militants anarchistes qui montrent l’enseignement de la révolte dans la doctrine anarchiste. P. Kropotkine, dans « La Morale Anarchiste » : « Nous, nous sommes des révoltés et nous avons invité les autres à se révolter contre ceux qui s’arrogent le droit de traiter autrui comme ils ne voudraient nullement être traités eux-mêmes. Contre ceux qui ne voudraient être ni trompés, ni exploités, ni brutalisés, ni prostitués, mais qui le font à l’égard des autres… Jusqu’à présent, l’humanité n’a jamais manqué de ces grands cœurs qui débordaient de tendresse, d’esprit ou
Tel est le fait qu’on se doit de constater : l’esprit de