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Page:Faydit de Terssac - À travers l’Inde en automobile.djvu/16

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En Bengale


l’orbite gouvernemental et les « Mem-Sabeh » que leur santé ou leurs plaisirs obligent à fuir la chaleur exaspérante et la monotonie des longs jours d’été dans les plaines. Ceux que leurs affaires ou la malechance d’un poste officiel secondaire retiennent à Calcutta, se débattent à grands renforts de moustiquaires, de paillassons humides appliqués aux portes et aux fenêtres, contre des nuées d’insectes, une température moyenne de 50° et une poussière blanche, aveuglante, qui s’étend en nappes épaisses et liquides sur les pelouses roussies, saupoudre les mimosas flamboyants et s’élève en trombe suffocante sous le pas des coolies et les ébats des chiens parias. On voit la poussière, on respire la poussière, on palpe la poussière ; elle devient un ennemi personnel, une obsession, l’on se méfie d’elle, on fuit, ou bravement on l’affronte, avec un semblant d’indifférence. Elle est là, partout, toujours, attachée au moindre brin d’herbe, à la plus modeste feuille ; elle s’étale, elle trône, elle demeure la souveraine unique et incontestée de la ville qu’elle affole et subjugue de ses vagues capricieuses.



Une tristesse de rues trop larges, de maisons trop hautes, plane sur Calcutta désert. Dans cette lumière implacable, sous un ciel de zinc, la laideur prétentieuse de certaines grandes bâtisses européennes s’accentue, amplifiée, mise en relief par un climat et un sol ennemi. Aux heures relativement fraîches du soir, l’on sort, en se traînant jusqu’à la rivière Hoogly, pour écouter une fanfare qui joue dans un jardin public, et l’on reste là jusqu’à la nuit, s’amusant à voir passer les gens et les choses, bercé par le clapote-