Page:Femmes-poëtes de la France, éd. Blanvalet, 1856.djvu/88

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 62 —



J’ai tout perdu, bonheur, santé, richesse ;
Et, quand par eux pouvaient unir mes maux,
Il m’a fallu douter de la tendresse
De ces amis qui m’ont dû le repos !

L’aspect d’un fils et l’amour d’une mère
Savaient encore au monde m’attacher,
Entre leurs bras j’oubliais ma misère ;
Mais de leurs bras je me vis arracher.

Loin d’eux j’habite une perfide terre
Où d’un époux m’attendaient les malheurs ;
Je vois ses yeux privés de la lumière,
Ne plus s’ouvrir que pour verser des pleurs !

De ce tableau, qui par degrés me tue,
Je veux en vain m’épargner la douleur ;
Si quelquefois j’en détourne ma vue,
Je le retrouve aussitôt dans mon cœur.

Matin et soir en tous lieux il m’obsède,
Il vient la nuit en rêve me chercher.
À ma souffrance il n’est point de remède,
Et je n’ai pas un cœur où l’épancher !