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LIVRE xiv.

de sa voix ravirait les hommes et les dieux. Il est ainsi récompensé pour avoir aimé le peuple qu’il assembla dans l’enceinte de ses nouveaux murs, et auquel il donna des lois.

De l’autre côté, tu peux voir, entre ces myrtes, Cécrops, Égyptien, qui le premier régna dans Athènes, ville consacrée à la sage déesse dont elle porte le nom. Cécrops, apportant des lois utiles de l’Égypte qui a été pour la Grèce la source des lettres et des bonnes mœurs, adoucit les naturels farouches des bourgs de l’Attique, et les unit par les liens de la société. Il fut juste, humain, compatissant ; il laissa les peuples dans l’abondance, et sa famille dans la médiocrité ; ne voulant point que ses enfants eussent l’autorité après lui, parce qu’il jugeait que d’autres en étaient plus dignes.

Il faut que je te montre aussi, dans cette petite vallée, Érichthon, qui inventa l’usage de l’argent pour la monnaie : il le fit en vue de faciliter le commerce entre les îles de la Grèce ; mais il prévit l’inconvénient attaché à cette invention. Appliquez-vous, disait-il à tous les peuples, à multiplier chez vous les richesses naturelles, qui sont les véritables : cultivez la terre pour avoir une grande abondance de blé, de vin, d’huile et de fruits ; ayez des troupeaux innombrables qui vous nourrissent de leur lait, et qui vous couvrent de leur laine ; par là vous vous mettrez en état de ne craindre jamais la pauvreté. Plus vous aurez d’enfants, plus vous serez riches, pourvu que vous les rendiez laborieux ; car la terre est inépuisable, et elle augmente sa fécondité à proportion du nombre de ses habitants qui ont soin de la cultiver : elle les paye tous libéralement de leurs peines ; au lieu qu’elle se rend avare et ingrate pour ceux qui la cultivent négligemment. Atta-