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Page:Fenelon - Aventures de Telemaque suivies du recueil des fables, Didot, 1841.djvu/508

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tenait dans sa main une houlette courbée et noueuse. Sa queue paraissait derrière, comme se jouant sur son dos. Mais comme Bacchus ne pouvait souffrir un rieur malin, toujours prêt à se moquer de ses expressions si elles n’étaient pures et élégantes, il lui dit d’un ton fier et impatient : Comment oses-tu te moquer du fils de Jupiter ? Le Faune répondit sans s’émouvoir : Hé ! comment le fils de Jupiter ose-t-il faire quelque faute ?





XXII. Le Nourrisson des Muses favorisé du soleil.




Le Soleil, ayant laissé le vaste tour du ciel en paix, avait fini sa course, et plongé ses chevaux fougueux dans le sein des ondes de l’Hespérie. Le bord de l’horizon était encore rouge comme la pourpre, et enflammé des rayons ardents qu’il y avait répandus sur son passage. La brûlante Canicule desséchait la terre ; toutes les plantes altérées languissaient ; les fleurs ternies penchaient leurs têtes, et leurs tiges malades ne pouvaient plus les soutenir ; les Zéphyrs mêmes retenaient leur douces haleines ; l’air que les animaux respiraient était semblable à de l’eau tiède. La nuit, qui répand avec ses ombres une douce fraîcheur, ne pouvait tempérer la chaleur dévorante que le jour avait causée : elle ne pouvait verser sur les hommes abattus et défaillants, ni la rosée qu’elle fait distiller quand Vesper brille à la queue des autres étoiles, ni cette moisson de pavots qui font sentir les charmes du sommeil à toute la nature fatiguée. Le Soleil seul, dans le sein de Téthys, jouissait d’un profond repos : ensuite, quand il fut obligé de remonter sur son char attelé par les Heures, et devancé par l’Aurore qui sème son chemin de roses, il aperçut tout l’Olympe couvert de nuages ; il vit les restes d’une tempête qui avait effrayé les mortels pendant toute la nuit. Les nuages étaient encore empestés de l’odeur des vapeurs soufrées qui avaient allumé les éclairs et fait gronder le me-