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Page:Fenelon - Aventures de Telemaque suivies du recueil des fables, Didot, 1841.djvu/79

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TÉLÉMAQUE.

parure vaine, leur démarche languissante, leurs regards, qui semblaient chercher ceux des hommes, leur jalousie entre elles pour allumer de grandes passions ; en un mot, tout ce que je voyais dans ces femmes me semblait vil et méprisable ; à force de vouloir plaire, elles me dégoûtaient.

On me conduisit au temple de la déesse : elle en a plusieurs dans cette île ; car elle est particulièrement adorée à Cythère, à Idalie et à Paphos. C’est à Cythère que je fus conduit. Le temple est tout de marbre. C’est un parfait péristyle ; les colonnes sont d’une grosseur et d’une hauteur qui rendent cet édifice très-majestueux ; au-dessus de l’architrave et de la frise sont à chaque face de grands frontons, où l’on voit en bas-relief toutes les plus agréables aventures de la déesse. À la porte du temple est sans cesse une foule de peuples qui viennent faire leurs offrandes. On n’égorge jamais, dans l’enceinte du lieu sacré aucune victime ; on n’y brûle point, comme ailleurs, la graisse des génisses et des taureaux ; on ne répand jamais leur sang ; on présente seulement devant l’autel les bêtes qu’on offre, et on n’en peut offrir aucune qui ne soit jeune, blanche, sans défaut et sans tache. On les couvre de bandelettes de pourpre brodées d’or ; leurs cornes sont dorées, et ornées de bouquets de fleurs les plus odoriférantes. Après qu’elles ont été présentées devant l’autel, on les renvoie dans un lieu écarté, où elles sont égorgées pour les festins des prêtres de la déesse.

On offre aussi toutes sortes de liqueurs parfumées, et du vin plus doux que le nectar. Les prêtres sont revêtus de longues robes blanches, avec des ceintures d’or et des franges de même au bas de leurs robes. On brûle nuit et jour, sur les autels, les parfums les plus exquis de l’Orient