Page:Ferdinand Buisson - Sébastien Castellion - Tome 1.djvu/115

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STRASBOURG. CHEZ CALVIN. 97 -l7I77.SÉtC'lN2.O7Z chrétienne aux « Évangéliques », c`était de donner un corps at leurs idées, une expression à leur foi. Ils protes- taient contre des superstitions, contre des interprétations i matérialistes du dogme et du culte. Ils aspiraient ai une reli- gion en esp1·it, fondée sur la Bible, alimentée par l`étude et par la priere. Protestations vagues, vagues aspirations qui n`eussent peut-être rien créé ni dans l`Eglise ni en dehors d’elle. Il fallait de ce tourbillon d`idées dégager un principe et tirer des conséquences. - Il le fallait, d’abord pour que chacun pût se rendre compte de sa foi et en rendre témoignage; il le fallait surtout pour u organiser la Réforme, pour la défendre contre sa propre dis- ' , persion. C’est ce que Calvin comprit des la premiere heure et ce qu`il voulut jusqu`a la derniere. En publiant l’InstiLu¢ tion chrétienne, il levait drapeau contre drapeau. · L`Église comptait sur la majesté de ses traditio11s quinze fois séculaires. Qu’était-ce, pour ébranler une telle puis- , sance, que le sarcasme des vieux fabliaux, le scrupule litté- raire des humanistes, la dissidence des théologiens sur des points de dogme, la défiance même de quelques cœurs droits et de quelques esprits justes, révoltés parle fanatisme? Calvin sentit ce qui faisaitla force de l’Eglise, et il s’en servit contre elle. Ce qu’il appela a son aide contre l’Èglise corrompue, ce fut l’Église dans sa pureté primitive; contre l’Évangile tronqué, l’Évangile intact; cont1·e la plus haute autorité qui fut sur la terre, l`autorité même d'où elle prétend dériver. Par une de « ces décisions hardies » que Bossuet admire, en les lui reprochant, à l’unité il oppose plus d`unité encore, it l’ordre un ordre plus rigoureux. Il ne faut pas se figurer Calvin proclamant une émancipation quelconque : le con- traire serait plutôt vrai. Il n'est,ï ainsi que l'a tres bien expliqué Mignot, ni un révolutionnaire de génie comme Luther, ni un missionnaire comme Farel : logicien et juriste, il apporte au protestantisme l’esprit de logique dans le dogme, l’esprit d’autorité dans la discipline. Que certaines violences de langage a l`adresse de l`Église, — que la rude et altière familiarité de ses railleries contre « les moineries » et « les messotiers » ne nous induisent ' 7