CONCLUSION. M3 pensée et de la volonté de l’homme, la foi n’a plus rien a craindre ni rien a attendre du dehors-: il n’y a plus ombre de religion, la ou il y a l'ombred.’une contrainte. Entre Dieu et la conscience nul ne peut plus intervenir. La religion s’est envolée bien loin au-dessus du domaine ou atteint la force. Tout ce que le commandement d’autrui peut imposer ou inter- dire, c’est un acte extérieur, c’est un mouvement du corps. L’ame lui échappe. Or l’ame est tout pour cette religion nouvelle. Et d_u moment que la sincérité de l’ame est devenue le premier de tous les devoirs, saliberté devient du même coup le premier de tous les droits. Où avons-nous trouve ces principes énoncés, exposés, répétés a satiété? Est—ce sous la plume d’u11 grand penseur devancant son siecle? C’est dans une humble compilation qui ne prétend aucunement a l`originalité. La farmgo Bellet n'en est que plus précieuse, et la démonstration qu’elle apporte _ plus éclatante. Elle prouve qu’en matiere morale et religieuse la vérité n’est pas l’apanage des grands esprits et que la Réforme a eu raison de conlier l’avenir de ses destinées ai ` la conscience de tous plutot qu’au génie de quelques—uns. Une heure peut venir où le génie s’égare, ou les pasteurs des peuples pris de vertige s’arretent et tournent un regard d’envie vers la grande Unite catholique : ils sentent le peu qu'ils sont pour lutter contre elle dans leur dispersion et leur instabilité; désespérant de la vaincre sans lui emprunter le secret de sa force, ils décident de l`imiter pour la mieux combattre; reniant leur principe sous prétexte de l’amender, ils rebroussent chemin vers l`autorité 2 a cette heure—la meme, la foule des fidèles — qui est mieux qu`une foule, précisé- ment parce qu’elle se compose d’unités indépendantes et sou- · veraines — se redresse et résiste; elle répond ai cet ordre de retour en arrière par un non possumus d’un caractere tout nouveau, et les simples, les .humbles, relevant leur drapeau à demi déchiré, lui jurent fidélité quand même et, sous le feu de leurs propres chefs, poursuivent, sans l1OSlt£ttlO1l,l£\. marche en avant de la Réforme et de l’humanité.
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