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étendues et qu’il ne peut pas rendre les expressions scientifiques ou abstraites, ou s’élever à une haute portée morale et pleine de dignité’. Nous avouons aussi avec franchise qu’il s’élève difficilement au-dessus du comique, et en voici la cause : c’est que ses vers ont une marche trop précipitée, étant ordinairement de quatre à huit syllabes. — Du reste, le wallon n’en est pas moins capable de supporter une versification large et majestueuse, et il est partout à l’aise, en dehors même des petites pièces qu’il affectionne. Quant à ce reproche qu’on lui fait encore, que son allure est trop populaire (et l’on cite à l’appui des fragments du Voëgge di Chofontaine), une simple réflexion en fera justice. Qu’on lise la liste des personnages de cet opéra, et l’on trouvera que raisonnablement on ne pouvait faire minauder et parler avec afféterie des dames de la Halle. Mais prenez et feuilletez li Ligeoi egagi (1757) ; vous y trouverez plusieurs scènes où le sentiment est délicatement exprimé. Nous citerons en particulier la scène IV, où Marianne se trouve seule avec Colas, son amant, qui, par étourderie, vient de s’enrôler. Nous pensons que l’on ne pourrait, en moins de mots, mieux faire parler deux amants :

Maïane.

Jewâd, Colass.

Colass.

Oh ! k’a-je oïou ?

Maïane.

Inn mi louk nin !… Vi fai-je paôu ?

Colass.

Diem !… Ji n’sé koi li dire.

Maïane.

Colass, n’ess nin po rire ?
Viz égagi !… Sèrive si sò ?