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encore citer à l’appui les différentes chansons politiques de notre malheureux rapsode, le vieux Simonis, qui chantait avec émotion, en s’essuyant les yeux :

Ja v’nou plusieur feie pò chanté,
Et j’aveu li cour à ploré :
C’est inn sakoi d’bin mâlhureu,
Di mori d’faim et d’fé l’ joyeu !

Il existe une infinité d’autres chansons ; mais dans la plupart la grâce, le sentiment et le goût marchent rarement de front ; il nous est pénible d’affirmer qu’il en est peu où ces qualités se trouvent réunies. Dans ce nombre, il est bien entendu que nous ne classons pas ici ces refrains graveleux et orduriers qui se hurlent quelquefois dans les rues. Toute langue a ses égouts, et la nôtre, sous ce rapport, n’a rien à envier à la muse latine ou française. Du reste, ces dernières chansons brillent plus par la grossièreté que par l’esprit ; souvent même, elles n’ont pas de mesure et riment très-irrégulièrement ; et sauf le rire bête qu’elles ont parfois le privilége de faire naître à cause de leurs bouffonneries et de leurs plates obscénités, nous ne leur aurions pas fait l’honneur de la mention. Il n’y a là ni élan ni verve, et leurs auteurs, toujours anonymes, et souvent illettrés, n’ont qu’une connaissance superficielle et tout à fait routinière d’un langage dont ils n’ont saisi ni le mécanisme ni l’esprit.

Comme nous avons déjà eu l’occasion de le dire, les Contes ne nous manquent pas ; mais ce genre est de beaucoup plus restreint que la chanson ; cela se conçoit. Nous citons le suivant comme modèle d’esprit et de finesse, et pour réclamer la priorité d’invention, en