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Le morceau suivant, que nous reproduisons encore intégralement, peut être cité comme exemple :

Binamé Diu ! Ké rmowe manège !
Kél jôie sò turtò les visège !
Onz ô rôlé les karillon,
Petté les chambe, hoûlé l’kanon ;
Les hiètte, les kloke sonnet à foesse,
Kél atteleie ! Diu, ké disdu !
On creie, on brai, on dâr to ju…[1]

Il est une expression particulière au wallon que nous ne devons pas omettre, quoique ce soit un jurement bassement trivial. Chez les Hébreux, comme on sait, on reconnaissait un membre de la tribu d’Éphraïm à l’espèce de sifflement dont il accompagnait la prononciation du mot Schibolet. Au pays de Liège on reconnaît un étranger à la prononciation embarrassée du mot : m’koye ! Il n’y a qu’un Liégeois de naissance qui l’attaque d’une façon vigoureuse et sonore[2].

Une vérité enfin que nous nous ferons un honneur de mettre au jour, c’est que la langue des Quarante n’a pas dédaigné de faire à notre patois des emprunts ; et comme preuve superflue qu’il possède tous les carac-

  1. Cantâte ligeoise à grand keur presentaye â Prince li jou diss Election, li 20 avri 1763. — ( Liège, 1763) in-8º. V. p. 3.
  2. Par une pudeur incompréhensible, nos lexicographes n’ont pas osé donner place dans leurs vocabulaires à ce mot, qu’employait sans honte Cicéron (coleus), et qu’ont recueilli de même Roquefort, Glossaire de la langue romane, tome I, pag. 374, verbo coile ou coille ; et Raynouard, Lexique roman, tome II, pag. 433, verbis coil, colho, colha, en citant des phrases d’exemples. V. aussi Du Cange, Carpentier, etc.