Page:Ferrand - Fables et légendes du Japon, 1903.djvu/30

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n’avons qu’une parole… Je suis pris ; c’est malheureux pour moi ; mais ce qui est fait, est fait… Je n’ai pas le moins du monde l’intention de me sauver… Je voulais seulement te rendre un service… Il te serait si facile de me lier de nouveau, et de me remettre à la même place, avant le retour de ton mari !… Il n’en aurait rien su du tout… Mais, puisque tu n’y consens pas, c’est bon. N’en parlons plus… Pile ton riz… Après tout, peu m’importe !

Tora n’était pas méchante, et ne soupçonnait point le mal chez les autres. Elle se dit qu’en définitive, cet animal pouvait être sincère, et que ce serait bien heureux, s’il consentait à piler le riz à sa place. Après quelques hésitations :

— Me promets-tu de ne pas te sauver, si je te détache ? demande-t-elle..

— Foi de blaireau, je te le jure ! répond le perfide animal.

La trop confiante femme détache le blaireau et lui passe le pilon. La bête le saisit et, avant même que la pauvre vieille ait eu le temps de pousser un cri, il lui en assène sur le crâne un coup d’une telle violence, qu’elle tombe raide morte sur le plancher de la cuisine.

Le blaireau ne perd pas de temps. Il prend un coutelas, découpe en morceaux le cadavre encore chaud de sa victime, empile ces morceaux dans la marmite qui lui était réservée à lui-même, et se met à la faire bouillir. Puis, il se métamorphose. Car chacun sait que le blaireau possède l’intéressante