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Croyez-moi donc, ne passez plus le temps
À vouloir tous les deux en imposer aux gens ;
Vous êtes devinés, vous perdez votre peine.
Écoutez : depuis deux mille ans
Du plus grand philosophe[1] on nous cite un passage
Qui défend de parler de soi.
Pour tous ses sectateurs c’étoit devenu loi ;
Et voici la raison de ce fameux adage :
Du bien qu’on dit de soi chacun retranchera,
Mais au mal qu’on en dit chacun ajoutera,



FABLE CXXVII.

LE RAMIER ET LE CORBEAU.


 
Le ramier disoit au corbeau :
Tu ne verras donc plus cette bonne corneille
Qui te logeoit l’hiver au creux de son ormeau,
Et l’été sous l’abri de son épais rameau ;
Qui ne radote point quoiqu’elle soit bien vieille,
Et qui t’aimoit d’amitié sans pareille ?
— Je ne vais plus chez elle et sans savoir pourquoi.
— Mais je te le dirai de la meilleure foi :
Tu n’en reçus que soins et politesse ;
Et tu lui répondis l’autre jour devant moi,
À propos d’un mot de tendresse,
Avec beaucoup d’humeur et même de rudesse.
Enfin d’un bon ami voilà souvent le sort :
De le quitter, de le fuir on se presse
Sitôt qu’avec lui l’on a tort.

  1. Confucius, législateur des Chinois.