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Courtisan plein d’art et d’adresse,
Tu profanes l’encens flatteur
Que l’on ne doit qu’à la jeunesse :
Mais quel doit être ton tourment !
Car tu n’es pas né pour la feinte.
Ici tu vivrois sans contrainte,
Et nous plairois bien aisément.
Tu n’oses donc être sincère ?
Je te plains, c’est un vrai malheur :
Dans nos hameaux, tout au contraire,
On n’oseroit être trompeur.
Chez vous tout est de conséquence,
Souris, regards, propos, maintien :
Chez nous l’on ne prend garde à rien,
Si ce n’est à l’indifférence.
Notre plaisir, simple et sans fard,
Mieux que le vôtre se varie ;
Comme la fleur de la prairie,
Il renaît sans peine et sans art,
Je vis un jour tout l’étalage
Du séjour pompeux de tes grands :
Tout en ce lieu sent l’esclavage ;
Je n’y trouvai que l’avantage
De n’y rester que peu d’instans.
Lasse de voir clinquant, dorure,
Sans regret je fis mes adieux,
Et je vins reposer mes yeux
Sur un beau tapis de verdure ;
Je préférai flûtes, hautbois,
Aux aigres et perçantes voix
Des Amphions de vos chapelles,
Qui sont réduits au seul honneur,
Ne pouvant chanter pour les belles,
De chanter pour le créateur.