Page:Fertiault - Le Carillon du collier, 1867.djvu/10

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Oh ! la toute-puissante ! Oh ! l’astre !! Et qu’elle attise
Savamment le bûcher de vos cœurs ! En son œil
Brille, appel trop fatal, l’ardeur qui magnétise…
Courez, papillons fous qui riez de l’écueil !

Courez ! La Charmeresse est de force et de taille
À se poser en but à tout vaillant coureur.
Alertes ! Son beau corps est un champ de bataille…
Vainqueurs toujours vaincus, partez avec fureur !

Ne croyez pas, au moins, toutes les places prises :
Toujours en a son cœur, et son Collier… toujours.
Pour son immense vogue il n’est point de surprises…
Libre, par ses amis elle compte ses jours.

Allons ! accumulez vos chutes autour d’elle !
Comme des moucherons l’un sur l’autre tombez !
De vos cent mille morts elle sort immortelle…
Place ! troupeau d’amants, chapeaux bas ! reins courbés !

Laissez-la radier, puisqu’elle vous domine,
Et, si ce n’est assez du fulgurant métal,
À cette déité, près de qui tout chemine,
Vite abattez vos fronts pour faire un piédestal !

Elle mérite bien, la Courtisane-Reine,
Elle mérite bien ce triomphe sans pair…
Esclaves, portez-la jusqu’au bout de l’arène
Sans savoir, au trajet, si votre sang se perd.

Aussi bien il lui faut la grande apothéose
Pour s’étourdir un peu dans ses amers instants ;
Souvent un voile noir s’étend sur son ciel rose…
Car c’est lugubre, allez, de ternir des printemps !! —