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Page:Feuerbach - Essence du Christianisme, 1864.pdf/233

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essence du christianisme

bellie, purifiée de toute matière grossière, contemplée dans l’image originale.

Purifiée et embellie, ai-je dit ; — or, une amélioration, un embellissement des choses supposent en elles un défaut, un sujet de mécontentement pour nous. Mais ce mécontentement n’est que superficiel. On ne leur refuse pas une certaine valeur ; seulement, telles qu’elles sont, elles n’ont pas le don de nous satisfaire. On rejette en elles certaines conditions ; certaines qualités, mais non leur essence ou leur nature, car autrement on s’empresserait de les faire disparaître. Si une maison me déplaît, je la fais raser et non pas embellir. La foi au ciel rejette ce monde, mais non pas son essence, pour ainsi dire, — quelque chose seulement déplaît dans sa manière d’être. Ainsi, la joie plaît aux croyants, — qui ne ressentirait la joie comme quelque chose de vrai, d’essentiel ? — mais il leur déplaît que la joie soit ici-bas suivie de sensations contraires, qu’elle ne dure qu’un instant. Ils l’admettent donc dans le monde futur, mais avec les attributs de l’infinité, de la divinité ; ce monde est pour eux le règne du bonheur ; il est vrai que d’abord ils en avaient fait un attribut de Dieu, qui n’est que la joie éternelle réalisée dans un être. L’individualité leur plaît, mais non avec les penchants de la chair ; aussi ne l’acceptent-ils que complètement pure, absolument subjective. La lumière leur plaît, mais non la pesanteur qui leur paraît être un obstacle, mais non la nuit dans laquelle l’homme est sous la dépendance de la nature. Là-haut il y a lumière, mais pas de pesanteur, pas d’obscurité ; il y règne un jour pur et sans fin.

Si l’homme, en s’écartant de sa propre nature, en