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LA RELIGION

par une simple parole, ou par un seul mot rendre la vue aux aveugles. Les gens qui ne veulent pas entendre parler de miracles, de démons et d’esprits, c’est-à-dire des causes secondes de la superstition, et qui cependant admettent la doctrine de la création, cette cause première de toutes les croyances superstitieuses, sont tout simplement ridicules et absurdes.

XII

Plusieurs Pères de l’Église ont soutenu que le Fils de Dieu ne provient point de la volonté, mais de l’essence du Père, que l’acte de la génération, comme acte provenant de l’essence, de la nature de Dieu, a dû précéder l’acte de la création, qui est un acte de la volonté. C’est ainsi que, même dans la conception du Dieu surnaturel du christianisme, quoique par une contradiction flagrante avec l’essence même de ce Dieu, la vérité de la nature a fait valoir ses droits. Avant l’activité de la conscience, de la volonté, on croit devoir mettre l’activité de la nature, — et c’est avec raison. La nature doit exister avant qu’il y ait des êtres qui puissent se distinguer d’elle et la prendre pour objet de leur intelligence et de leur volonté. Aller de l’absence de toute intelligence à l’intelligence, c’est le chemin de la sagesse ; si l’on suit la marche opposée, on va directement dans la maison des fous de la théologie. Faire précéder la nature par l’esprit, c’est placer le ventre de l’homme sur sa tête. Le parfait suppose l’imparfait. Plus un être est élevé, accompli, plus il suppose l’existence d’autres êtres avant la sienne. Ce ne sont pas les êtres produits les premiers, non ! ce sont