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VI
PRÉFACE

ment par d’autres points, et je me rencontrerai avec eux. » L’entreprise une fois commencée, il est allé jusqu’au bout. Tout ce qui, de près ou de loin, touchait à son sujet, était aussitôt disséqué et analysé. « Les lois de la maladie sont aussi belles que celles de la santé, » a dit un médecin enthousiaste ; bien connaître le mal, c’est déjà connaître le bien. Si l’on peut s’habituer au dégoût causé par les maladies du corps et se livrer avec ardeur à leur étude, il en est de même pour les maladies morales, et d’autant mieux, que celui-là seul peut les guérir qui en a lui-même souffert. Dans de pareils cas, ce n’est pas l’objet qui lui répugne que le penseur étudie, mais l’objet qu’il a aimé et que d’autres aiment encore ; il veut s’expliquer son genre d’attrait, en trouver le fondement dans notre nature. Rien n’est à négliger dans une affection pathologique qui fait croire aux malades qu’ils sont la santé en personne ; ils chérissent leur erreur comme la prunelle de leurs yeux ; aussi notre auteur se livre-t-il à des analyses microscopiques et reproduit-il ses preuves sous mille formes différentes, pour avoir quelque chance de l’extirper.

Il ne faudrait pas s’imaginer que Feuerbach avait fait son siège d’avance, et qu’il a pris à partie la religion pour la dénigrer. Il sait qu’il n’y a qu’un sot qui puisse calomnier un jésuite, et il ne se met pas une seule fois à découvert devant ses adversaires en hasardant une opinion tant soit peu incertaine. Sa méthode est celle de la science digne de ce nom ; il ne parle pas lui-même, il laisse parler les choses. La religion n’est pas avare