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LA RELIGION

ceaux de leurs victimes sacrifiées, en l’honneur desquels ils faisaient fumer l’encens avec tant de prodigalité ? Ces dieux étaient les sens cultivés des Grecs. C’est lui-même, lui seulement que sert l’homme en servant la divinité. Ce n’est qu’à son amour de la magnificence, à son penchant pour la prodigalité, pour le luxe, qu’il immole des hécatombes.

LIII

Dès que l’homme n’attribue plus qu’une valeur secondaire à la jouissance et à la beauté physiques, à la richesse et à la puissance, dès que les biens moraux, la sagesse et la vertu sont considérés par lui comme le bien suprême de la vie, dès lors ses dieux deviennent des êtres moraux qui ne veulent plus être adorés ou implorés pour quelque bien extérieur spécial. Le profit et la récompense de l’adoration se trouvent dans l’adoration elle-même, car nous ne pouvons honorer un être que par ce qu’il honore lui-même, que par des sentiments et des actions d’accord avec sa nature, des êtres libres, bienveillants, sans passions, que par des intentions qui leur soient sympathiques. Les dieux accordent tout à celui qui pense comme les dieux ; en effet, il ne leur demande rien qui ne soit déjà en lui-même, rien qui dépende des caprices du hasard et de la fortune.

LIV

Les idéalistes et les romantiques modernes ont fait de la religion une affaire de galanterie, de vaine