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LA RELIGION

inquisitorial ont dû trouver certainement qu’elles duraient une éternité.

LXIII

Dans le ciel de la théologie chrétienne, nous recouvrerons notre corps, mais il sera parfait. Il aura comme le corps terrestre tous ses organes, sans en excepter un seul, mais aucun d’eux n’accomplira ses fonctions physiologiques : ce sera un corps divin, sans besoins d’aucune espèce. Ce que fait ici la théologie, elle le fait en tout et pour tout. De même qu’elle préfère un corps fantastique à un corps réel, la perfection surnaturelle d’un corps imaginaire à la perfection réelle du corps terrestre, de même, en général, elle sacrifie la terre au ciel, l’humanité à la divinité c’est-à-dire la vérité à l’imagination, la réalité à l’apparence. De même que le corps céleste est un corps sans rien de ce qui constitue un corps, de même l’être divin est un être personnel sans personnalité, réel sans réalité, vivant sans vitalité. De même que le corps céleste a tous les organes, mais sans but, sans fondement et sans besoin de même l’être divin a toutes les qualités de l’homme, esprit, intelligence, volonté et amour, mais sans en avoir besoin aucunement, car l’esprit suppose la chair, la volonté l’absence de volonté, l’amour le manque, le désir de quelque chose. De même que le corps céleste est un pur article de luxe, de même l’être divin théologique est l’être le plus superflu du monde, un être qui ne peut satisfaire, par conséquent, que des besoins imaginaires, superflus. Des besoins réels ne peuvent être satisfaits que par un être plein de besoins