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Page:Feuerbach - La Religion,1864.pdf/25

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XVI
PRÉFACE

sur le christianisme, sur ses contradictions, sur son incompatibilité avec la science et le progrès, il l’approuve sans restriction ; il reconnaît avec lui que même dans l’art l’idéal chrétien est presque une monstruosité ; ce n’est plus la nature ennoblie, la perfection du réel, la fleur de ce qui est ; c’est, au contraire, l’antinaturel, la divinisation de la souffrance physique, de la maladie, la préférence pour tout ce qui excite le dégoût. En un mot, il ne le contredit en rien d’essentiel ; on peut même dire, sans crainte d’être démenti, qu’il n’y a pas dans ses ouvrages une seule idée que Feuerbach n’ait exprimée avant lui avec bien plus de force, et cependant il nous assure qu’il est presque inutile de le lire. Que M. Renan y réfléchisse bien, et il s’apercevra que toute sa vie à lui se passe et se passera probablement à démontrer l’inébranlable certitude des conclusions de l’auteur qu’il traite à la légère. C’est leur lumière qui l’a guidé ; il n’a fait que la tamiser pour la vue trop sensible des âmes faibles, et bien souvent il l’a mise sous le boisseau.

Les questions traitées par ces deux écrivains ne sont pas les mêmes, quoique appartenant à un même sujet, la religion, et leur manière de les aborder diffère complètement. M. Renan croit et s’efforce de nous faire croire que ce qu’il importe le plus d’étudier, c’est l’origine des traditions. Feuerbach ne dédaigne pas cette étude, mais il affirme qu’il est impossible de commencer par elle. Il est prouvé, en effet, que pour l’entreprendre il faut être déjà parvenu à un degré de culture très