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XXXIX
PRÉFACE

quel et nous dire : « Que vous en semble ? N’est-ce pas ainsi que les choses ont dû se passer ? » Quel que soit le talent dont il a fait preuve, a-t-il réussi ? Les uns diront oui, les autres non, avec tout autant de raisons pour motiver leur jugement. Je n’ai pas à faire ici la critique du livre, je me contenterai de dire que Pierre, Paul ou Baptiste, se proposant d’écrire la biographie du Christ, et sachant à quoi s’en tenir sur sa divinité, comme M. Renan, s’en acquitteront chacun à leur point de vue d’une manière différente, seront tous également dans le vrai et dans le faux, et que le résultat final sera, en définitive, absolument le même. Dans un travail de ce genre, le talent est tout, l’intention philosophique presque nulle ; il s’agit de faire œuvre d’art. La démonstration de l’idée première, l’humanité de Dieu, si elle est réussie, est chose excellente assurément ; mais au point de vue de la science actuelle, si l’on ne s’occupe que d’un fait particulier, l’incarnation chrétienne, par exemple, on reste au-dessous de la critique. La question d’histoire et d’art mise de côté, quelle que soit son importance, je demande, et c’est là que je voulais en venir, si M. Renan nous a appris quelque chose. Que nous a-t-il dit de la religion, de ses racines dans l’esprit et dans le cœur de l’homme, de ses transformations parallèles à celles de la société, de ses rapports avec la science, l’art, la morale, de son influence dans le passé et dans le présent ? Rien, absolument rien. Il le fera plus tard, répondra-t-il. Soit, et c’est là que je l’attends ; nous