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LA RELIGION

tement à ce but, il suffit de jeter sur les choses un regard superficiel. Rien que la vue de l’insecte le plus petit et le plus méprisable faisait verser des larmes d’amour et d’admiration à saint François d’Assise ; plus nous étudions la nature, plus nous devenons familiers avec sa manière d’agir, plus nous arrivons à l’idée de son indépendance, à la connaissance de ses mobiles intimes et plus la variété qui excite l’admiration de nos regards se ramène aux mêmes buts, aux mêmes lois et aux mêmes formes. Que des milliers de créatures variées et infiniment petites possèdent et emploient les mêmes moyens que nous pour vivre et se conserver : ce fait que l’on aperçoit au premier coup d’œil suffit complètement au point de vue religieux. Mais chercher à savoir comment sont construits les divers organes d’un animal, de quelle façon il s’en sert, en quoi consiste sa nourriture, quelle est sa manière de vivre : tout cela a sa source dans le besoin de science, un des plus profonds de notre être. D’ailleurs la sagesse et la bonté ne sont que des attributs généraux, indéterminés d’un sujet placé par la pensée en dehors du monde, sinon comme force, du moins comme existence, et la puissance pure n’est pas seulement un attribut indéterminé, mais encore qui ne dit rien. Entre ces attributs et un animal de telle ou telle forme, de tel ou tel organisme ou un autre être naturel quelconque il n’y a aucun rapport. Je puis reconnaître la sagesse et la bonté tout autant par l’animal que voici que par un autre d’une espèce différente ; par un arbre, par une pierre, sans parler de cette circonstance inutile à développer ici, que d’un être personnel il ne peut venir que des êtres personnels et non des êtres insensibles,