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IV

C’est la fantaisie seule qui a fait naître l’idée que l’homme n’aurait pu s’élever au-dessus de l’état de pure bestialité sans la Providence, sans le secours d’êtres surhumains tels que des dieux, des esprits, des anges et des génies. Certainement l’homme n’est pas devenu seulement par lui-même ce qu’il est aujourd’hui ; il avait besoin pour cela de l’appui, de la protection d’autres êtres ; mais ces êtres étaient des créatures réelles et non imaginaires, au-dessous et non au-dessus de lui : car tout ce qui aide l’homme dans son activité, soit méditée, soit involontaire, tous les dons et toutes les facultés utiles lui viennent d’en bas et non d’en haut, lui viennent des profondeurs de la nature. Ces êtres secourables, ces génies protecteurs de l’homme, ce furent surtout les animaux. C’est par leur aide qu’il s’est élevé au-dessus d’eux, c’est sous leur protection que la semence de la civilisation humaine a pu prospérer. « Le monde subsiste par l’intelligence du chien, est-il dit dans le Zend-A-Vesta, dans la partie de ce livre la plus ancienne et la plus authentique, dans le Vendidad ; s’il ne veillait pas sur les chemins, tous les biens seraient enlevés par les loups et par les voleurs. » Cette importance des animaux pour l’homme surtout à l’époque de la formation des sociétés justifie pleinement les honneurs religieux qu’on leur rendait. Ils étaient pour l’homme des êtres indispensables, nécessaires ; d’eux dépendait son existence humaine ; mais ce dont la vie, ce dont l’existence de l’homme dépend, cela est Dieu pour lui. Si les chrétiens n’a-