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MARGUERITE D’AUTRICHE

au tombeau en 1516. Son Voyage du pénitent et son Instruction des jeunes pucelles attestent, entre autres ouvrages, la facilité de son esprit aussi bien que l’ardeur de sa piété. La femme du premier Henri de Bourbon, prince de Condé, morte en 1586, mérite pareillement d’avoir sa place dans l’histoire de notre littérature. Nous nommions tout à l’heure Charles VIII : une princesse qui lui fut fiancée et qui n’est pas étrangère à la France (c’était la fille de Marie de Bourgogne), Marguerite d’Autriche, n’écrivit pas avec moins de distinction en prose et en vers ; c’est dans notre langue qu’elle a composé le Discours de ses infortunes et de sa vie, car elle eut une carrière marquée par beaucoup de traverses. Après que Charles VIII lui eût préféré, en 1491, Anne de Bretagne, elle était sur le point d’épouser l’infant d’Espagne, fils de Ferdinand et d’Isabelle, lorsqu’il mourut tout à coup. Aussi, quand un nouveau projet d’union lui destina pour mari Philibert le Beau, duc de Savoie, et qu’elle allait le joindre par mer, assaillie d’une tempête qui menaçait ses jours, se faisait-elle avec une naïveté mélancolique cette épitaphe souvent citée[1] :


Ci gît Margot, la gente damoiselle,
Qu’eut deux maris et si mourut pucelle.


Il n’en fut rien toutefois ; mais bien et dûment mariée au duc de Savoie, elle devint trop tôt veuve pour son bonheur. Elle se consola de la perte d’un époux

  1. Notamment par Fontenelle, dans l’un de ses Dialogues des morts.