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MADEMOISELLE DE GOURNAY.

de tous ses devoirs et dans la pratique désintéressée du bien, les yeux attachés sur le terme de l’existence : car quiconque a mal vécu ne saurait aboutir sans miracle à une bonne mort.

Dans un autre morceau, qui, comme quelques-uns des suivants, se rapproche davantage d’un genre de composition familier aux anciens rhéteurs, et particulièrement à Plutarque, mademoiselle de Gournay examine « si la vengeance est licite. » Son opinion est qu’il convient d’établir entre les offenses une distinction essentielle. Pour les vulgaires, on en poussera l’oubli aussi loin que possible ; mais il est des torts d’une gravité exceptionnelle, qu’il y aurait un grand inconvénient à laisser impunis. En poursuivre la réparation est, selon elle, non seulement équitable, mais nécessaire : autrement, les méchants enhardis deviendraient par trop redoutables. L’homme de bien saura donc joindre à une généreuse bonté, indulgente au repentir, une fermeté qui contiendra l’audace et servira de sauvegarde aux lois de l’éternelle justice. À beaucoup d’honnêtes gens dont la facilité, complice du mal, trahit la cause de la vertu, on peut recommander cette lecture, qui abonde en mâles sentiments. Ajoutons que de sages préceptes déterminent, à la fin de cet opuscule, la mesure et la discrétion qu’on doit observer, même dans l’exercice d’une vengeance légitime.

Parmi les causes qui en provoquent les plus fréquents et les plus funestes effets, figure la médisance. Mademoiselle de Gournay lui a consacré un traité spécial : il est dédié à la célèbre marquise de Guercheville,