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LE MARÉCHAL DE MONTLUC.

rassiers du temps, etc. Et, à cet égard, par les récits de Montluc comme par ses goûts, on peut dire qu’en ce qui concerne l’art militaire il marque assez bien la transition du quinzième siècle au seizième.

S’il aime donc surtout ces combats d’homme à homme, où chacun déploie sa force et ses ressources individuelles, où on lutte pied à pied avec cette furie toute française, comme les Italiens parlaient dès cette époque, Montluc pressent aussi les lois de la stratégie moderne. Mais ses Commentaires, qui nous éclairent à ce sujet, nous offrent encore bien d’autres renseignements. Ils ne nous font pas pénétrer seulement dans les camps, mais dans l’intelligence de la société et des mœurs à cette époque ; nous leur devons des particularités sérieuses sur nos usages et la langue. Ils nous donnent de plus, sur leur auteur, de nouvelles lumières, en nous apprenant à le mieux connaître, en nous offrant çà et là l’expression de plusieurs sentiments qui lui font honneur. Aucun n’eut plus de puissance sur lui et ne fut plus durable que son amour de la gloire. Cette belle passion, la seule qu’il connut, après avoir été l’aiguillon de la jeunesse de Montluc, fut encore le charme et la consolation de ses vieux jours. « À présent, dit-il en finissant son livre, que je me vois tirant à la mort dans le lit, je me sens grandement soulagé ; en dépit d’elle, mon nom vivra non-seulement dans la Gascogne, mais parmi les étrangers. » Toutefois l’ardeur de son amour-propre ne le rend pas injuste pour les autres ; il leur attribue volontiers, dans ses récits, les éloges qui leur reviennent. Rien ne