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PIERRE RAMUS.

tendait que le bruit cessât. Puis, sans s’émouvoir, il reprenait sa leçon dans les moments de répit qui lui étaient laissés ; et, triomphant à la fin d’une minorité malveillante, maître de son auditoire comme de lui-même, il terminait au milieu des applaudissements. »

On ne sera donc pas surpris des grands éloges accordés par les contemporains de Ramus à son éloquence. Mais elle eut encore dans la suite de plus mémorables effets. Par elle il apaisa, dans un moment critique, ces reîtres noirs dont Agrippa d’Aubigné rappelle les ravages ; il sauva ses compatriotes des coups de cette soldatesque effrénée qui venait à prix d’argent se mêler à nos guerres civiles et en alimenter la fureur. Tout annonce, conformément à cet exemple, qu’il possédait au point le plus élevé l’art d’émouvoir une foule et de la transformer par cette persuasion souveraine qui est l’œuvre de l’orateur. Il n’aurait tenu qu’à lui de s’ouvrir, en s’appliquant aux affaires, l’accès de hautes situations politiques. On voulut lui confier des misions importantes ; mais il se renferma toujours volontairement dans le domaine, plus beau à ses yeux, de la spéculation.

La sécurité ménagée aux études de Ramus cessa malheureusement par la mort soudaine de Henri II. Cet événement, qui enlevait son plus ferme appui à l’illustre professeur, ranima l’espoir de ses envieux et de ses adversaires, tandis que Ramus augmentait sans relâche le nombre des uns et des autres ou par ses travaux ou par ses plans de réforme ; en 1562 notamment il en présenta un relatif à l’Université, dont il