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PIERRE RAMUS.

à la rage des meurtriers : non contents de s’acharner contre la victime, ils s’acharnèrent contre son cadavre. Mais détournons les yeux de cette scène de cannibales, qu’on trouvera retracée avec une noble indignation dans le livre de M. Waddington. Considérons plutôt, d’après le savant et ingénieux appréciateur de Ramus, l’action qu’il a eue sur ses contemporains, ses principaux ouvrages, et l’opinion qu’à notre époque il faut conserver de lui.

Déjà on a pu voir quelle influence considérable il exerça de son temps. Il fut chef d’école ; et nous avons dit que ses doctrines ne demeurèrent pas renfermées dans notre pays : propagées non-seulement par ses livres et par ses cours, mais par un commerce assidu de lettres qu’il entretenait avec la plupart des hommes marquants de l’Europe, elles se répandirent fort loin. Dans l’Allemagne spécialement, ses inspirations fécondes multiplièrent les ramistes ; ainsi appelait-on ses sectateurs. Sa supériorité devait, au reste, lui assurer des partisans aussi enthousiastes que ses adversaires furent intraitables. Ajoutons à son honneur qu’il eut des amis dévoués, au nombre desquels on peut citer Hubert Languet, Christophe de Thou, Etienne Pasquier, Loisel, Séguier, Castelnau, Bellièvre, et, avant tous les autres, l’énergique Omer Talon, dont le nom fut peu après illustré dans la magistrature.

Les protecteurs ne lui manquèrent pas davantage, et même dans les rangs les plus élevés, quoique leur appui n’ait pas été assez efficace pour défendre son repos et sa vie. On signalera parmi eux le cardinal Charles de Lor-