Page:Feuillet - Monsieur de Camors, 1867.djvu/384

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angoisse. Elle crut entendre la voix de Camors s’élevant avec violence, puis ce bruit s’apaisa. Le médecin en sortant lui dit simplement :

— Madame, son état me paraît grave, mais non désespéré… Je n’ai pas voulu le presser aujourd’hui ;… il m’a permis de revenir demain.

Dans la nuit qui suivit, vers deux heures, madame de Campvalion entendit qu’on l’appelait : elle reconnut la voix de Daniel. Elle se leva aussitôt, jeta une mante sur elle, et le fit entrer :

— Madame, dit-il, M. le comte vous demande. Et il fondit en larmes.

— Mon Dieu, qu’y a-t-il ?

— Venez, madame, il faut vous hâter. Elle l’accompagna aussitôt.

Dès qu’elle eut mis le pied dans la chambre, elle ne put s’y tromper. La mort était là. Épuisée par la douleur, cette existence si pleine, si fière, si puissante, allait finir. La tête de Camors, renversée sur les oreillers, semblait avoir déjà une immobilité funèbre. Ses beaux traits, accentués par la souffrance, prenaient le relief rigide de la sculpture. Son œil seul vivait encore, et.la regardait. Elle s’approcha à la hâte, et voulut saisir la main qui flottait sur le drap. Il la retira. Elle eut un gémissement désespéré. Il la regardait toujours fixement. Elle crut voir qu’il essayait de parler et qu’il ne le pouvait plus ; mais ses yeux parlaient. Ils lui adressaient quelque recommandation à la fois impérieuse et suppliante qu’elle