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Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 1, 1948.djvu/182

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Charançon, riant. — Ah ! ah ! à Paris, la Beauce… Ah ! elle est ignorante comme une petite carpe… c’est exquis !… mon gros poulot, va !

Il l’embrasse sur le cou.

Samuel (n° 1) entrant et apercevant Charançon qui embrasse Miranda, — Oh ! (Il se retourne et s’appuie la tête contre le mur.) J’ai rien vu ! Allez donc ! allez donc !

Charançon, se levant et passant au 2. — Ah ! l’animal ! Quoi ! qu’est-ce que tu veux ?

Samuel. — C’est rien ! c’est pour vous dire que j’ai fait envoler l’oiseau.

Charançon. — Eh bien ! ce n’est pas une raison pour entrer comme sur une place publique !

Gratin, paraissant à la porte de la cuisine ; il a un tablier de cuisine. — Dis donc ! viens donc voir ma sauce.

Charançon, furieux. — Flûte ! tu m’embêtes avec ta sauce !

Gratin. — Je ne te dis pas ! Mais j’ai mis de la farine dedans. Ça n’a plus l’air d’une mayonnaise… Ça fait de la pâte…

Miranda. — Mais on ne met pas de la farine dans la mayonnaise ! je suis curieuse de voir la cuisine que vous faites là-bas ! Allons, viens, Charançon !

Charançon, — Ah ! que c’est embêtant ! On est toujours dérangé !

Samuel. — Je ne veille plus sur monsieur.

Charançon. — Eh ! non… Si c’est ça qu’elle appelle un rendez-vous d’amour…

Ils entrent tous à la cuisine. La scène reste vide un instant.

Scène VII

Édouard, Gabrielle

Édouard, entrant du fond avec Gabrielle. — Entrez ! n’ayez pas peur !

Gabrielle, très émue, se laissant tomber sur une chaise à gauche de la table. — Ah ! mon ami ! ces émotions me brisent ! Il me semble que dans la rue je lis dans tous les regards : voilà la femme Édouard qui va passer aujourd’hui en police correctionnelle !

Édouard. — Non, Gabrielle, je vous assure qu’ils ne disent pas ça, les regards, et puis, vous n’y êtes pas encore en police correctionnelle ! Tout peut s’arranger.

Gabrielle, avec doute. — Oh !

Elle se lève.

Édouard. — Mais si ! mais si. Le commissaire n’est pas un ogre ! Nous lui avons écrit une lettre d’excuses très gentille, il ne peut pas demander plus !

Gabrielle. — Ça ne nous dit pas qu’il retirera sa plainte !

Édouard. — Mais si ! Voyons ! D’abord le télégramme qu’il vient de nous envoyer en réponse à notre lettre est de bon augure.

Gabrielle. — Vous croyez ?

Édouard. — Dame ? Qu’est-ce que vous voulez de plus ? Il s’excuse de ne pouvoir venir lui-même parce qu’il est malade ! Mais il nous envoie son frère. Il est probable que s’il nous envoie son frère, c’est qu’il veut entrer en conciliation !