Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 1, 1948.djvu/251

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Follbraguet, rongeant son frein. — Oh !

Marcelle. — Que les domestiques sont plus que moi ici…

Follbraguet. — Mais non, non.

Marcelle. — Si, si ! Eh bien, je te passe mes pouvoirs ! Désormais, tu voudras bien t’occuper de la cuisinière, de ses comptes et de ses menus ! (À la cuisinière.) Désormais, vous voudrez bien vous adresser à Monsieur, moi je démissionne ! Au revoir !

Elle sort en bourrasque.

Follbraguet, courant après elle. — Marcelle ! Marcelle !

Voix de Marcelle. — Fiche-moi la paix !

La Cuisinière. — Alors qu’est-ce que Monsieur veut manger pour dîner ?

Follbraguet, furieux. — Je m’en fous !

La Cuisinière, aussi fort que lui. — Et moi aussi.

Follbraguet. — Qu’est-ce que vous dites ? C’est à moi que vous dites : « Je m’en fous ! »

La Cuisinière, dont l’aplomb tombe. — Mais, Monsieur…

Follbraguet. — Allez ! allez ! je vous fiche dehors. Allez faire vos malles. Vous partirez séance tenante…

La Cuisinière. — Oh ! mais, monsieur, je n’ai pas dit cela pour offenser Monsieur…

Follbraguet. — Allez ! filez ! vous partirez tout de même !

La Cuisinière. — C’était pour une augmentation… comme Hortense.

Follbraguet. — Allez ! allez ; et plus vite que ça ! (Il la pousse dehors et referme la porte en la faisant claquer.) Ah ! mais, tout le monde se fiche de moi, ici !

Adrien, qui a assisté à tout cela, effacé dans un coin. — Faut-il faire entrer le client ?

Follbraguet. — Oui ! non !… zut ! si…


Scène X

FOLLBRAGUET, VILDAMOUR, ADRIEN

Adrien, ouvrant la porte fond droit. — Si Monsieur veut entrer !

Vildamour, descendant en scène. — Oh ! oui ! (À Follbraguet, pendant qu’Adrien sort.) Oh ! monsieur, j’ai pas pu y tenir… J’ai plus mal qu’avant…

Follbraguet, indiquant le fauteuil. — C’est bien, asseyez-vous là !

Vildamour. — Oui, monsieur.

Follbraguet, la tête ailleurs, les coudes au corps, agitant convulsivement les deux poings et sur un ton de sourde menace. — Oh ! oh ! oh ! oh ! oh !

Vildamour. — Comment ?

Follbraguet. — Non, rien, je me parle.

Il lui attache une serviette autour du cou.

Vildamour. — Attendez, vous me prenez le menton !

Follbraguet lui dégage le menton.

Follbraguet. — Vous n’avez qu’à faire attention !

Vildamour, voyant que Follbraguet prépare le caoutchouc. — Vous allez encore me mettre tout un mobilier dans la bouche ?