Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 2, 1948.djvu/163

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Armandine. — Non merci, mon petit ! Ah ! tu diras en bas que si un monsieur vient me demander on lui réponde que je n’ai pu l’attendre parce que j’ai été appelée auprès de ma mère qui est malade ; tu as compris ?

Victor, avec un soupir. — Oui, madame !

Armandine. — Allons, va, petit ! et guéris-toi !

Victor. — Merci, madame.

Pinchard. — Il est malade ?

Armandine. — Oui, il a des clous ! Soigne-toi bien ! (À Rédillon.) Allons, viens !… (Au moment de sortir, à Rédillon qui la suit.) Ah ! mon sac !

Rédillon. — Oui, oui ! (À Victor.) Le sac, là !

Victor. — Le sac, voilà !

Il prend le sac de Pinchard sur la table et le remet à Rédillon.

Rédillon, emportant le sac, à part. — C’est le sac à la dame, ça ?… Eh bien ! vrai !

Les Pinchard causent à droite et ne voient pas le jeu de scène. Victor la suit du regard en soupirant.

Mme Pinchard. — Je m’apprête, moi, si nous devons aller à l’Opéra !

Elle se dirige vers le cabinet de toilette où elle entre.

Pinchard. — C’est ça. (À Victor.) Eh bien ! qu’est-ce que t’as à rester là planté comme une borne, clampin.

Il va se rajuster devant la glace de la cheminée.

Victor. — Monsieur ?

Pinchard. — Alors, comme ça, t’as des clous, toi !

Victor. — Oui, monsieur le Major, Oh ! c’est pas grand’chose !

Pinchard. — C’est bien, je connais ça ! Médecin major dans la cavalerie, j’en vois plus souvent qu’à mon tour !… Fais voir !

Il regagne la droite.

Victor, descendant. — Oui, monsieur, j’ai attrapé ça !…

Pinchard. — Je ne te demande pas de boniments ! Déculotte-toi.

Mme Pinchard revient du cabinet de toilette.

Victor. — Monsieur le Major ?

Pinchard. — Tu ne comprends pas le français ? Je te dis : déculotte-toi !

Victor, interloqué. — Mais, monsieur le Major…

Pinchard. — Quoi ! C’est ma femme qui te gêne ? Fais pas attention, elle est sourde !

Victor. — Ah ! bon !

Il met la main sur le bouton de ceinture de son pantalon, puis hésite.

Pinchard. — Eh bien ! qu’est-ce que t’attends ?

Victor. — Mon Dieu, monsieur le Major, c’est que je vais vous dire, si c’est par curiosité, ça va bien, mais si c’est pour le clou, je l’ai au cou !

Pinchard. — Hein ! au cou ! Qu’est-ce que tu me chantes ! un clou au cou ! Est-ce que ça compte ça ? Est-ce que ça empêche le service, ça, un clou au cou ? Voudrait être dispensé de cheval pour un clou au cou !