Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 2, 1948.djvu/172

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l’as reçu un roulée ! (Moue de Vatelin.) Tu veux encore taper ta petite Maggy ?

Vatelin. — Abuser ainsi de sa force !

Maggy, allant un peu à lui. — Alors tu vas l’être bien gentil pour ton petit Maggy ?

Vatelin. — Mais insensée, rien ne peut donc t’arrêter ! comment, tu sais que ton mari a la puce à l’oreille…

Maggy. — Il a un puce dans l’oreille ?

Vatelin. — C’est une expression ! Il sait tout, si tu aimes mieux ! car enfin, sans mon télégramme…

Maggy. — Aoh ! yes ! je tombai dans le bec du loup !

Vatelin. — Mais absolument ! (changeant de ton.) Seulement, on ne dit pas bec du loup, on dit gueule. Le loup n’a pas un bec, il a une gueule.

Maggy. — Comment, tout à l’heure je dis "gueule", tu me disé"bec".

Vatelin. — Non, pardon, tu disais "gueule de gaz". Eh bien ! pour gaz, on dit bec, mais pour les autres animaux, on dit gueule. Simple petite observation… en passant. (Reprenant.) Eh bien ! non, non ! le rôle que tu me fais jouer est inadmissible, je ne peux pas ! je ne peux pas ! Si tu n’es pas raisonnable, je le serai pour toi ! Adieu !

Il remonte.

Maggy, le rattrapant par la manche. — Crépine ! Crépine ! reste ! oh ! reste !

Vatelin. — Non, laisse-moi, laisse-moi !

Maggy. — No !

Vatelin. — Non ?

Maggy. — Eh bien ! je vais me touier !

Vatelin, posant son chapeau sur le lit. — Encore ! mais, sapristi, c’est du chantage ! Eh bien, touillez-vous, et laissez-moi tranquille !

Il descend.

Maggy. — All right !… je prends ma thé et je mours !

Elle se sert.

Vatelin. — Eh ! allez donc ! Mours donc !

Maggy, qui s’est versé une tasse de thé. — Vous prend une tasse de thé ?

Vatelin. — Hein ?

Maggy. — Je dis : Vous prend une tasse de thé ?

Vatelin. — Si vous voulez !

Elle lui sert et lui passe sa tasse.

Maggy, le sucrier dans la main. — Un morceau ? deux morceaux ?

Vatelin, modestement. — Quatre !

Il s’assied à la table.

Maggy, qui s’est sucrée également. — C’est beaucoup !

Vatelin, tout en tournant sa cuiller dans la tasse, pour faire fondre le sucre. — Pffo !

Maggy, tirant un flacon de sel de sa poche. — Une goutte ? deux gouttes ?

Vatelin. — Je ne sais pas, ce que vous voudrez, une cuillerée ?

Maggy. — Aoh ! c’est beaucoup !

Vatelin, tendant sa cuiller. — Qu’est-ce que vous voulez, je suis très gourmand, moi !

Maggy. — Aoh ! C’est égal ! Un cuillerée, il y avait de quoi touiller toute une régiment.