Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 2, 1948.djvu/205

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Rédillon, qui tourne le dos pour cacher son émotion, ne pouvant plus résister et des larmes dans la voix. — Je vous aime bien tous les deux !

Vatelin, lui serrant la main ainsi que Lucienne. — Brave ami !… (Ils s’embrassent tous les trois. À Lucienne.) Ah ! il a été bien bon, va !

Rédillon et Lucienne gagnent la droite.

Le Commissaire, descendant. — Le procès-verbal est terminé, si vous voulez en prendre connaissance.

Vatelin. — Le procès-verbal ! Il n’y en a plus de procès-verbal ! Il n’a plus de raison d’être, le procès-verbal ! (Passant à Lucienne.) Nous le déchirons le procès-verbal !…

Le Commissaire. — Hein ?

Vatelin. — Allons ! Monsieur le Commissaire, allons déchirer le procès-verbal !…Il l’entraîne au fond.

Le Commissaire. — Mais qui est-ce qui m’a donné des girouettes pareilles ?

Rédillon, seul en scène avec Lucienne. — Eh bien !

Lucienne. — Eh bien ?

Rédillon. — C’est remis !

Lucienne. — C’est remis !

Rédillon, souriant. — Et moi, alors, c’est fini ?

Lucienne. — C’est fini… dame ! vous savez ce qu’a dit la somnambule : je dois avoir deux aventures dans ma vie, la première est passée, la seconde à cinquante-huit ans. Si ça vous tente ?

Rédillon. — Hum ! à cinquante-huit ans !

Lucienne. — Eh bien ! dites donc !

Rédillon. — Oh ! ce n’est pas pour vous, vous serez toujours charmante, mais c’est pour moi, je serai bien fatigué.

Lucienne, gentiment moqueuse. — Toujours, alors !

Vatelin, redescendant, suivi de Pontagnac. — Voilà c’est réglé ! Quant à vous, Pontagnac, je devrais vous en vouloir, mais je n’ai pas de rancune, et la preuve, je donne à dîner tous les lundis, voulez-vous être de mes fidèles ?

Pontagnac. — Moi ! Comment ?… Ah ! vraiment !

Vatelin. — Nous sommes entre hommes ! c’est le jour où ma femme dîne chez sa mère !

Pontagnac, comprenant la leçon. — Ah ! avec plaisir ! (À part). Allons, je n’ai plus rien à faire ici !

Rédillon, bas à Lucienne. — C’est égal, si quelquefois la fantaisie vous reprenait, eh ! bien, prévenez-moi la veille !

Gérome, du fond. — On ne déjeune pas alors !

Rédillon. — Si !

Vatelin, Lucienne, Rédillon, remontent un peu.

Pontagnac, redescendant, à part. — C’était écrit, je suis le dindon !

Il les rejoint.

RIDEAU