Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 2, 1948.djvu/22

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Lanoix. — Mademoiselle ?

Lanoix. — Vous dites ?

Julie. — Non, parlez !…

Lanoix. — Après vous !

Julie. — Chut ! Mme Landernau. Tout à l’heure !

Scène VI

Les Mêmes, Amandine

Lanoix, à part. — Ah ! Bibiche ! (Haut.) Bonjour madame !

Amandine, venant de droite. — Ne vous dérangez pas !… Ne faites pas attention !… (À part.) M. Pacarel m’a priée, pour la bienséance, de jeter un coup d’œil par là, mais sans les troubler, en ayant l’air de ne pas avoir l’air ; Marthe viendra après.

Julie s’est assise sur la chaise du bureau. Lanoix a pris la chaise que vient de quitter Julie.

Lanoix, tournant sa langue. — On ne le croirait pas, mademoiselle, par cette chaleur, je mouille jusqu’à quatre gilets de flanelle par jour !

Amandine, qui a fouillé dans son panier. — Ah ! mon Dieu !

Julie. — Quoi ?

Amandine. — Rien ! (Lisant le billet.) "Depuis que je vous ai frôlée, je vous aime." C’est lui,… c’est le ténor… Ah ! Dieu !… l’imprudent, il m’écrit… J’avais bien vu qu’il me regardait. "Depuis que je vous ai frôlée"… où ça m’a-t-il frôlée ?… Dieu ! Ce doit être l’inconnu que j’ai croisé un jour d’orage dans la colonne Vendôme… Il faisait tellement noir, je n’ai pu le voir… mais j’ai entendu sa voix, car il s’est écrié : "Tiens ! on a mis un bouchon dans la colonne !" Ah ! oui, celui-là, il m’a frôlée… et bien, encore !… Pauvre jeune homme, serai-je impitoyable… faudra voir !…

Elle remonte vers le fond.

Lanoix, saluant. — Madame !

Amandine. — Ne vous dérangez pas, mes enfants…

Elle sort.

Scène VII

Julie, Lanoix, puis Marthe

Lanoix, Julie. — Eh ! bien ! voyons, que vouliez-vous me dire ?

Julie. — Je n’ose pas ! Parlez d’abord.

Lanoix. — Je n’ose pas non plus.

Julie. — J’aime mieux vous l’écrire.

Lanoix. — Et moi aussi.

Julie, prenant du papier sur le bureau. — Voilà du papier.

Ils écrivent, Lanoix à la table, Julie au Bureau.

Julie et Lanoix. — Là ! Voilà, c’est fait.

Ils échangent leurs papiers, en se levant.

Julie et Lanoix, lisant chacun son papier. — "L’on ne force pas ses sentiments." Hein !…

Julie. — Nous avons dû nous tromper de papiers ?

Ils échangent leurs papiers,