Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 2, 1948.djvu/28

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Dufausset, salue et remercie. À Julie, — Voulez-vous recommencer, mademoiselle, j’y suis.

Tous. — Ah !

Julie prélude. Au moment où Dufausset ouvre la bouche pour chanter, on entend un orgue de Barbarie qui joue dans la coulisse.

Tous. — Oh !

Tout le monde se lève et remonte vers le fond.

Pacarel. — Que le diable l’emporte !

Marthe. — C’est un mendiant devant la grille.

Amandine. — Il faut lui jeter des sous pour qu’il s’en aille.

Pacarel. — C’est ça. (Il jette des sous.) Mais allez-vous en !

Tous, jetant des sous. — Allez-vous en ! Allez-vous en !

Pacarel. — Ah ! il s’en va.

Landernau. — Ce n’est pas malheureux.

On se réinstalle.

Pacarel. — Là, maintenant, si vous voulez bien…

Dufausset recommence à chanter ; au bout de deux mesures, on entend l’orgue qui reprend de plus belle.

Tous. — Oh ! encore.

Tout le monde remonte vers la fenêtre.

Dufausset, quittant le piano. — Il n’y a pas moyen de chanter comme ça ! Il joue un air, moi j’en chante un autre ; ça fait un courant d’airs… Ça n’est pas possible !…

Pacarel, vivement. — Un courant d’air ! Ah ! mon Dieu ! il a raison ! il pourrait prendre froid ! Vite ! fermez les portes ! (À Dufausset.) Couvrez-vous ! (Aux autres.) Couvrons-le !

Remue-ménage général. Tous cherchent un objet pour couvrir Dufausset, ahuri. Chacun se précipite, qui sur un foulard, qui sur un tapis de table, qui sur un manteau, pour couvrir Dufausset.

Dufausset, ahuri. — Mais qu’est-ce qui les prend ?

Pacarel, une chancelière à la main. — Un courant d’air ! Ah ! bien merci !…

Il coiffe Dufausset de la chancelière.

Landernau, au milieu du brouhaha général. — Eh ! bien, au fond, on ne serait pas connaisseur, on dirait : cet homme-là, c’est pas un chanteur, c’est une casserole !

RIDEAU