Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 2, 1948.djvu/27

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Marthe. — Oh ! monsieur, vous ne me refuserez pas, à moi !

Dufausset, à part. — Elle ! (Haut.) Mais je vous assure que je n’ai pas de voix…

Amandine. — Allons donc ! On dit toujours ça !

Julie. — Je vous accompagnerai…

Dufausset. — Où ça, mademoiselle ?

Amandine redescend vers le premier plan.

Julie. — Mais au piano.

Dufausset. — Oh ! j’irai bien seul…

Julie. — Mais non, je vous jouerai l’accompagnement, là !…

Dufausset. — Ah ! vous me… parfaitement… C’est que je vais vous dire… les pianos, ils sont tous faux, à côté de ma voix.

Marthe. — Enfin, nous essaierons.

Dufausset. — Alors, vous voulez que… Eh ! bien, tant pis pour vous, c’est vous qui l’aurez voulu !

Tous, avec satisfaction. — Ah !

Dufausset, à Marthe, bas. — Ah ! vous m’avez donné bien du bonheur !

Marthe. — Moi !…

Dufausset. — Oui ! Oh ! mais, allez, je vous en donnerai des jarretières…

Marthe. — À moi ! mais il est fou !

Julie. — Qu’est-ce que vous voulez chanter ?

Dufausset, s’avançant un peu. — Ça m’est égal… Je sais un peu… "Salut ! demeure chaste et pure !"

Julie. — Ah ! je connais, je l’ai refait.

Amandine, à Marthe. — Qu’est-ce qu’il vous a dit ?

Marthe. — Je ne sais… il m’a offert des jarretières !

Amandine. — Tiens, et à moi aussi ! C’est une monomanie.

Julie. — Y êtes-vous ?

Dufausset. — Voilà. (Bas à Marthe, en passant.) Je vous aime !

Marthe. — Ah ! mon Dieu ! Je suis aimée d’un ténor.

Landernau, qui a entendu. — Il fait la cour à Marthe !… Je le surveillerai.

Julie se met au piano et prélude.

Dufausset, toussant pour se mettre en voix. — Hum ! Hum !…

Pacarel. — Comme c’est déjà beau ! Comme on sent un grand ténor.

Amandine et Marthe, se pâmant. — Ah !…

Amandine. — C’est exquis !

Landernau. — Chut ! Bibiche !

Dufausset, chantant. — "Salut ! demeure chaste et pure !"

Il fait un couac.

Landernau. — Aie… il y a un chat !

Pacarel. — Où ça ?… faites-le sortir !

Amandine et Marthe. — Chutt ! ! !…

Dufausset. — "Salut ! demeure chaste et pure !" (bis).

Julie. — Non, permettez… vous descendez… on remonte.

Dufausset. — Moi, je descends toujours.

Pacarel. — Oui, c’est toujours comme ça pour les grands chanteurs… On modifie ! Bravo ! Bravo !

Tous. — Bravo ! Bravo !