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Il sort.

Madame Grosbois, la jumelle devant les yeux. — C’est très curieux, cet aigle qui passe et repasse.

Rudebeuf. — Comment, un aigle ?

Madame Grosbois. — Enfin, je ne sais pas, ou un vautour !… A l’œil nu, je ne le vois pas, et avec ma jumelle.

Rudebeuf. — Qu’est-ce que vous chantez, madame Grosbois ?

Madame Grosbois. — Mais tenez, regardez ! (Elle passe sa jumelle.) dans cette direction là !…

Rudebeuf. — Ah ! par exemple, c’est curieux, ça !… mais…, mais…, mais c’est dans la jumelle ! Il y a une mouche dans votre jumelle !

Madame Grosbois. — Une mouche dans ma jumelle ! Il y a une mouche dans ma jumelle ?

Rudebeuf. — Si c’est ça que vous appelez un aigle !

Madame Grosbois. — Ah, bien ! elle n’est pas ordinaire, celle-là ! Elle est un peu toquée, cette mouche-là !

La Foule. — La Gobron ! La Gobron ! Arrive Le Brison.

Scène II

Les mêmes, Le Brison

Le Brison, arrivant de droite et allant à Rudebeuf, radieux. — Ca va ! ça va ! J’arrive du poste voisin ! On a téléphoné. Nous sommes bons ! Nous sommes bons ! Trois minutes et demie à la croix de Kergorec ! Nous sommes bons !

Rudebeuf. — Qui, moi ?

Le Brison. — Non, moi.

Rudebeuf. — Ah ! ça me fait bien plaisir.

Le Brison. — A ce train-là, nous ne devons pas tarder à repasser.

Chatel-Tarraut, traînant la laisse veuve de chien. — Ne t’intimide pas Tchaï-Nou, fais tes petites affaires, mon chien-chien ! fais !

Le Brison, en passant près de Chatel-Tarraut. — Nous sommes bons ! Ca va ! ça va !

Chatel-Tarraut. — Pas trop mal ! La chérie est un peu constipée !

Le Brison, qui n’a pas écouté la réponse de Chatel-Tarraut, est déjà grimpé sur l’échelle. — Nous sommes bons ! Nous sommes bons !

Phèdre. — Quoi ?

Le Brison. — Hein ! Vous ! Pardon !

Il fait mine de redescendre.

Phèdre. — Oh ! vous pouvez rester, vous ne me gênez pas.

Le Brison. — Vous êtes bien bonne !

Chatel-Tarraut, sentant une résistance dans sa laisse sur le bout de laquelle quelqu’un a mis le pied. — Allons, ne te fais pas tirer. Tchaï-Nou, ne te fais pas tirer.

Le Monsieur, qui a levé le talon, ce qui rend la laisse libre. — Qu’est-ce qu’il a à traîner cette laisse derrière lui, ce bonhomme-là ?

Chatel-Tarraut. — Viens, Tchaï-Nou, viens !

Il sort.

Le Monsieur. — Il s’est échappé de sa niche.

La Foule. — La de Dion ! Bravo, la de Dion !