Long temps de gêne. Snobinet regarde à droite, à gauche, ne sachant quelle attitude prendre. Les deux domestiques affectent de ne pas s’apercevoir de sa présence.
Snobinet. — Hum !… c’est… c’est l’argenterie que vous faites-là !
Isidore. — Monsieur ?… (Il se lève, gêné.)
Snobinet. — Je dis… c’est l’argenterie que vous faites ?
Philomèle. — C’est l’argenterie, oui, monsieur. (Elle se lève également.) Monsieur demande si c’est l’argenterie que nous faisons…
Isidore. — Ah !… oui, monsieur. (Il s’assied.)
Snobinet. — C’est ça ! c’est ça ! C’est ce qui me semblait !… ça doit être assez dur.
Isidore. — Oh ! C’est un coup de main à attraper.
Snobinet. — Ah ! C’est ça ! c’est ça !
Un temps.
Isidore. — Monsieur ne désire pas s’asseoir… ? Monsieur doit être mal comme ça ? (A Philomèle.) Donne donc une chaise !
Philomèle, présentant sa chaise. — Tenez, Monsieur.
Snobinet, se frottant les jambes. — Oh ! je vous en prie… ne vous donnez pas la peine…. Merci bien ! (Il s’assied.) Je vous demande pardon de me montrer ainsi, mais une circonstance imprévue !… Je ne suis pas venu comme ça…
Les deux domestiques. — Oui, monsieur, oui !
Snobinet, après un temps. — C’est… c’est le monsieur de madame Paulette qui vient d’arriver ?
Isidore. — Monsieur Serge de Vieuxville, parfaitement !…
Snobinet, très aimable. — Ah ! enchanté !… de Vieuxville, oui, oui,… vieille famille !… euh ! Quel homme est-ce ?
Isidore, se sachant que dire. — Monsieur ? ben…
Snobinet. — Il est jeune, oui ! de… de quelle taille ?
Isidore. — Comme ça ! (A Philomèle.) N’est-ce pas ?
Philomèle. — Oui.
Snobinet. — Aha ! pas très fort ?
Philomèle et Isidore. Oh ! si !
Snobinet. — Ah !
Isidore. — Comme il fait beaucoup de boxe, n’est-ce pas !
Snobinet, riant jaune. — Aha !… bon exercice, la boxe bon exercice !
Isidore. — Oui.
Snobinet. — Je n’ai jamais eu le temps d’en faire. (Regardant du côté de la porte.)… Je le regrette bien aujourd’hui.
Isidore. — Il est encore temps… Monsieur est jeune.
Snobinet. — Oh ! évidemment pour…. pour l’avenir, mais… pour le….
Isidore. — Comment ?
Snobinet. — Non, rien.
Philomèle. — C’est drôle, je regarde monsieur,… que Monsieur m’excuse… Est-ce que Monsieur n’est pas au théâtre ?
Snobinet. — Moi, oui, oui ; Victor Snobinet, du Théâtre Sarah Bernhardt.
Philomèle. — Oh ! j’ai vu jouer monsieur ! Monsieur a beaucoup de talent.
Snobinet. — Oui, oui.
Philomèle, à Isidore. — Tu sais, c’est monsieur dont je t’ai parlé… qui nous a tant amusé… dans l’Aiglon.