Charlotte. — Ah ! Madame a un hômme !
Angèle. — Comme vous dites… Il est en voyage, mais il doit revenir d’un moment à l’autre.
Charlotte. — Ah ! bien, je serai contente de le voir, ce brave homme.
Angèle. — Allons, c’est bien. Je vous prends, et pour commencer, vous aurez quarante francs par mois.
Charlotte : — Quarante francs ! en or ?
Angèle. — En or !
Charlotte. — Oh ! que Madame est bonne !
Angèle. — Blanchie et nourrie.
Charlotte. — Blanchite et nourrite ?
Angèle. — Oui… maintenant, allez !
Charlotte. — Oui, Madame.
Elle remonte. Angèle passe en courant au n° 2, se dirigeant vers la chambre de droite où est caché Saint-Florimond.
Charlotte, revenant. — Madame !
Angèle, se retournant. — Quoi ?
Charlotte. — Si c’était un effet de votre bonté d’accepter ce panier ?
Angèle. — Ce panier ?
Charlotte. — Oui, C’est des œufs !… Je me suis dit comme ça : ça fera peut-être plaisir à la bourgeoise, des beaux œufs de la campagne… Alors, je les ai bien choisis… les moins frais.
Angèle. — Comment, les moins frais !
Charlotte. — Oui ! on m’a dit qu’à Paris on ne mangeait jamais des œufs frais.
Angèle. — Elle est d’un primitif adorable… C’est bien, allez ma fille… Vous vous appelez ?
Charlotte. — Charlotte, Madame ! (À part.) Allons, je crois que je suis tombée dans une bonne maison.
Elle sort par le fond.
Scène IV
Angèle, puis Saint-Florimond, puis Charlotte
Angèle. — Ouf ! maintenant lâchons l’autre ! (Allant à la porte de sa chambre et appelant.) Venez !
Saint-Florimond, paraissant. — On peut filer ?
Angèle. — Oui, dépêchez-vous !
Ils se dirigent tous deux vers la porte du fond.
Saint-Florimond. — Allons ! (S’arrêtant au milieu du théâtre et au fond, n° 2) Et voilà pourtant comment finit un roman où il ne s’est rien passé ! Adieu, Angèle, adieu ! (Un temps.) Angèle !
Angèle. — Quoi ?
Saint-Florimond. — Puisque nous sommes peut-être appelés à ne plus nous revoir sur cette terre, laissez-moi vous donner le baiser d’adieu !
Angèle. — Hein !