Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 8, 1948.djvu/132

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Dardillon. — Est-il possible !

Paginet. — Mais à une condition ! jurez-moi que vous oubliez à jamais que vous avez sauvé le ministre !…

Dardillon. — Moi !…

Paginet. — Oui !… Je vous dirai pourquoi !… Mais jurez !

Dardillon. — À ce prix là ! je le jure !

Madame Paginet. — Ah çà ! qu’est-ce que vous avez à chuchoter là-bas ?…

Paginet. — Vous allez le savoir !… Mes amis, j’ai l’honneur de vous annoncer les fiançailles de ma nièce avec monsieur Dardillon !

Simone. — Est-ce possible !

Dardillon. — Oh ! monsieur !

Plumarel. — Eh bien ! et moi ?

Paginet. — Qu’est-ce que vous voulez, c’est Dardillon qu’elle aime et pas vous. Je ne contrarie jamais les inclinations.

Plumarel. — C’est bien ! je n’insiste pas !

Paginet. — Allons ! voilà une bonne journée ! deux fiancés et deux décorés !…

Livergin. — Tu peux dire trois !… Je le suis aussi, moi !

Madame Paginet. — Vous !

Plumarel. — Comment ! vous le saviez !… moi qui me faisais un plaisir de vous l’annoncer.

Livergin. — Oui, mes amis, je suis nommé…

Plumarel. — Parfaitement ! Officier d’académie.

Livergin et Madame Livergin. — Qu’est-ce que vous dites ?

Plumarel. — Je dis ; vous êtes nommé Officier d’académie.

Paginet. — À la bonne heure !

Livergin. — Je suis Officier d’académie ! Je suis Officier d’académie ! Je suis Officier d’académie !

Paginet. — Eh bien, oui ! quoi ! Tu es Officier d’académie !

Madame Livergin. — Mon pauvre ami, tu vois, ton gouvernement !

Livergin. — Ah ! c’est trop fort ! (Tirant de sa poche une boîte en carton remplie de petits rubans.) Moi qui avais déjà acheté une douzaine de décorations.

Il tend machinalement sa boîte ouverte du côté de Paginet.

Paginet, prenant une décoration comme on prend une prise. — Merci !

Il la met à sa boutonnière.

Madame Paginet. — Enfin ! tu l’as, mon chéri ! Elle t’était bien due ! Il y avait si longtemps que tu la méritais sans l’obtenir !…

Paginet, à part. — Que je peux bien l’obtenir sans l’avoir méritée !…

RIDEAU