Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 9, 1948.djvu/128

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Follentin (pendant qu’il la lui met). — Vous savez, si ça ne vous fait rien, une autre fois quand vous vous mettrez en redingote, mettez donc le gilet par dessous.

Othon. — Ah ! vous croyez ?

Follentin. — J’en suis sûr !

Othon. — Voici ma toque !

Follentin (il la met). — Et voilà mon chapeau !… (Il l’enfonce sur la tête d’Othon). Là !… ça y est ?

Margot (se retournant). — Ah ! Follentin, que tu es beau comme ça !

Follentin. — N’est-ce pas ? Je crois que ça y est ! (Arpentant la scène.) Ah ! Ah ! Tripe del papa ! par la corbleu ! Sandi ! Mordi !… Mercredi !… Jeudi !… à Chantilly, Messieurs ! À Chantilly ! Tout le monde descend !

Margot. — Ami ! Ami ! Ce n’est pas le moment de plaisanter !

Follentin. — Ah ! Ah ! et Othon ! Regardez donc Othon ! A-t-il une touche comme ça !

Othon. — Je me sens tout gauche dans ce costume. (À Margot.) Je demanderai à Votre Majesté la permission de remonter jusqu’à ma chambre pour changer d’accoutrement.

Margot. — Allez, mon joli page ! d’autant que si une de mes dames d’honneur vous voyait !… Allez !

Othon sort par le fond.

Margot. — Et vous, mon beau Follentin, vous n’avez qu’à sortir comme si de rien n’était. En reconnaissant la tenue des pages du palais, personne ne s’avisera de vous demander qui vous êtes.

Follentin (s’inclinant et lui baisant la main). — Majesté !

Margot. — À bientôt ! Follentin !

Follentin. — À bientôt !

Il remonte. Coup de feu à la cantonade, au fond.

Follentin. — Qu’est-ce que c’est que ça ?

Othon, rentrant du fond, affolé. — Au secours ! Au secours !

Margot. — Qu’y a-t-il ?

Othon. — Là ! Là ! les gardes, le chef des pétardiers ! ils ont tiré sur moi !

Follentin. — Sur vous ?

Margot. — Vous n’êtes pas blessé ?

Othon. — Je ne sais pas !… Si !… Là !… mon chapeau.

Il plonge sa main dans l’intérieur et fait passer un doigt par le trou de la balle.

Follentin. — Oh ! mon numéro un ! Eh bien ! Ils vont bien !… On voit que cela ne leur appartient pas !…

Othon. — Je ne pourrai jamais regagner ma chambre tant que je serai dans ce costume !… (À Follentin.) Messire, si c’était un effet de votre bonté de vouloir bien me rendre…

Follentin. — Votre costume ? Ah ! non, merci ! Pour que ce soit sur moi qu’on tire !

Margot, à Othon. — Il y a peut-être un moyen ! Vous allez venir avec moi dans ce cabinet (À Follentin.) Quant à vous, ne perdez pas de temps ! Partez !