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xxviii

Au Poète


Un âne en train de braire à l’ombre d’une treille,
Y vit un rossignol qui rêvait à l’écart :
— Chante pour moi, dit-il, je suis un peu de l’art
Et j’ai sans me flatter du goût… & de l’oreille.

L’oiseau cède — & soudain dans le bois qu’il éveille
Merles, bouvreuils, pinsons, le cherchent du regard.
L’amant reste longtemps rêveur, & le vieillard
Sent revivre en son cœur le passé qui sommeille.

— Confrère, dit Martin, pas trop mal débuté !
Mais, crois-moi, si tu tiens à polir ton ramage
Prends deux ou trois leçons du coq du voisinage.

— Poète, as-tu saisi le trait que j’ai conté ?
Le rossignol, c’est toi ; chante loin des profanes
Car quels sont les trois quarts de tes censeurs ? — Des ânes !