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ÉPREUVES MATERNELLES

désespérance, se leva brusquement du fauteuil où elle était assise. Elle devait agir et ne pas devenir la proie des idées sombres. La lutte se poursuivait et elle devait vaincre le sort.

Elle sortit. Où se diriger ? Elle vit une église non loin et s’en rapprocha pour y entrer. Il était onze heures du matin.

L’ombre des nefs, leur calme la calmèrent et la reposèrent. Elle pria avec une ferveur renouvelée afin que Dieu ne l’abandonnât pas dans sa misère. Une détente libéra son esprit. Elle se releva plus sereine, fortifiée par cette prière et cette invocation aux pieds de la Vierge, dispensatrice d’énergie.

Elle reprit son chemin incertain. Chez qui s’informer ? à qui demander le pain quotidien ? La prière que l’on dit du bout des lèvres : « Donnez-nous notre pain quotidien », prend un sens terrible quand on la formule dans le besoin. Les deux mots sonnent comme un glas, étreignent le cœur qui bat dans un corps vide.

Au hasard, Denise se dirigea vers une épicerie. Une espérance la soulevait, venue d’En-Haut, elle le savait.

Elle entra et attendit son tour d’être servie :

— Que désirez-vous, Madame ?

C’était sans doute la patronne, peu aimable personne ayant simplement la politesse du commerçant. Denise, un peu effarouchée par le visage sans bonté, balbutia :

— Je voudrais des tablettes de chocolat.

— Voici.

Denise paya, puis, d’une voix oppressée qui contrastait avec son courage intérieur, elle s’enquit :

— Ne me connaîtriez-vous pas une place de cuisinière ?

— Pour vous ?

— Oui, pour moi.

— Ma foi, non. Qui êtes-vous d’abord ? Je ne vous ai jamais vue dans le quartier.

— Je ne suis pas de ce quartier, c’est vrai, mais, je puis vous montrer un certificat.

— Ah ! la la !… les certificats ! vous pouvez vous en fabriquer à la douzaine… on sait ce que cela vaut !

— Je n’ai pas fabriqué le mien, riposta Denise qui reprenait de l’énergie, du moment qu’elle avait