Page:Fiel - Armelle devant son vainqueur, paru dans l'Ouest-Éclair du 3 septembre au 10 octobre 1937.djvu/193

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pauvre Armelle subissait tous les supplices.

Comment accorder sa tendresse avec cette promesse ? Avouer son amour eût été subir une colère, une crise de désespoir et peut-être la mort de sa tante.

Pouvait-elle envisager une pareille éventualité sans frissonner de terreur ?

Elle se promit de demander conseil à son oncle, comptant lui relater la conversation et la sommation de sa tante.

Mais Gontran Solvit ne lui en laissa pas le temps. Il fournit l’occasion d’aborder le sujet épineux :

— Quand je songe, chère petite fiancée, que vous ne vouliez pas vous marier  ! quelle idée absurde vous aviez là !… heureusement pour moi, vous avez changé d’avis…

C’était pour Armelle le moment de faire souffrir et, en même temps, de déchirer son cœur. Elle se pardonna la douleur qu’elle allait causer à cause de celle qu’elle allait éprouver.

Elle faillit s’évanouir en répliquant d’une voix balbutiante :

— Détrompez-vous monsieur, j’ai réfléchi… Je veux être chanoinesse.

La stupeur paralysait Gontran. Il y eut un silence terrible, puis il dit :

— Mon Armelle… est-ce bien vous qui prononcez ces paroles ?

— C’est bien moi… bégaya la voix de l’aimée.

— Qu’ai-je commis ?

— Les hommes sont des personnages déconcertants qui me font peur…

— Je cherche en vain mon crime.

— Il est partout… dans l’accent de vos phrases, dans vos regards, dans les moindres manifestations de votre sympathie.