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cinéma !… cinéma !…

dans un salon de thé, oh ! un joli salon que tu aurais aimé, avec des tentures de soie jaune d’or, et…

— Trêves de bavardage et de mensonges !

— Mais, m’man…

— Je ne te crois plus. Tu me caches la vérité.

— Je t’assure, m’man…

Tout à coup, Claudine se révolta et cria :

— Et puis, j’en ai assez !… Jamais de liberté et tou­jours des reproches ! La vie est impossible dans les familles !

— Comment oses-tu te plaindre, Claudine, alors que je t’épargne une partie du ménage ?

— Ah ! bien, j’aurais de jolies mains pour travail­ler dans la soie !

— Aussi ne fais-tu rien dans la maison.

— Mais qui ne se plaindrait pas de se voir astreinte à une obéissance aveugle, comme si les parents étaient la science infuse ! On peut tout de même avoir des idées différentes et bâtir sa vie selon ses ten­dances. Qu’avez-vous de plus que les jeunes ? Votre âge !

— Claudine !

— Oui, et j’en ai assez d’être sous une férule.

— Avoue donc que c’est le cinéma qui te rend folle.

— Quelle idée !

— Je maintiens ce que je dis ! Quand tu vois évo­luer les artistes, tu n’as qu’une envie : partager leur existence. Tu dédaignes tes parents, notre logis, nos habitudes de braves gens, mes robes démodées et nos visages fanés de travailleurs. Ton père n’est pas là, puisque le pauvre homme est obligé de déjeuner à côté de son ministère. Quel chagrin ce serait pour lui de te savoir dans ces idées de grandeur, et quelle grandeur, toute de surface !… Ah ! tu ferais mieux d’épouser celui qui t’a demandée en mariage !

— Oh ! ne me parle pas de lui, cela mettrait le comble au dégoût que j’ai de mes jours présents.