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— C’est parfait, mais comme je n’ai ni l’un ni l’autre, je voudrais m’y risquer seule.

— C’est un peu téméraire !

— Tant pis ! Maintenant, les jeunes filles sont émancipées. Je suis majeure, d’ailleurs… vous aussi, et j’ai pensé qu’à deux nous pourrions tenter l’aventure.

— Oui, mais j’ai un fiancé qui ne serait peut-être pas content de me savoir dans un lieu où l’on s’amuse et où il ne serait pas.

Ces sages paroles vainquirent ma folie d’un instant. Je rentrai chez moi et je restai longtemps enfouie dans un fauteuil, cherchant les moyens de devenir riche afin de pouvoir épouser celui auquel je n’avais même pas parlé. Plus je pensais à lui, plus j’étais persuadée que lui seul me conviendrait, Je voulais croire que tout ce qui m’était suggéré venait de la Providence. N’avais-je pas vécu avec l’idée que Dieu donne la pâture aux oiseaux ? Et qu’étais-je, sinon un pauvre oiseau déshérité à la recherche d’un nid ?

J’allais essayer de dormir quand une idée fulgurante jaillit de mon cerveau : le billet de loterie.

Comment n’avais-je pas eu plus tôt cette idée si simple ? Un peu de chance et je possédais un million ! Mais, au fait, avais-je de la chance ? Oui, sans aucun doute. Je n’avais pas eu beaucoup de mal pour obtenir ma situation ; j’avais déniché ce petit appartement que le propriétaire, âme altruiste, me louait relativement bon marché, parce que j’étais une jeune fille orpheline.

Tout ce que j’avais arraché à la vie me parut soudain le résultat d’un admirable concours de circonstances, d’un faisceau de chances inespérées. De

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